La communication financière d’une entreprise doit être cohérente et répondre à une stratégie claire et nette. Dans le souci d’encourager les PME à adopter de bonnes habitudes dès leur entrée sur le marché financier régional, nous tacherons de présenter des exemples de mauvaises et bonnes communications financières.
Exemples de mauvaise communication financière à la BRVM : Cas de SERVAIR ABIDJAN CI, BOA et CFAO MOTORS
SERVAIR ABIDJAN CI : Mauvais timing
Le 03 Mai 2016, lors de l’assemblée générale de la compagnie, le management de SERVAIR ABIDJAN annonce le fractionnement de son titre à raison de vingt (20) actions nouvelles pour une (1) ancienne. Suite à cette publication, le cours de l’action bondit de +14.82% en seulement deux (2) jours.
Cette annonce est un catalyseur pour le titre qui va enregistrer une croissance exponentielle de +95.88% du début de l’année jusqu’au 28 septembre 2016. Avec un pic observé le 22 septembre à 180 000 FCFA avant fractionnement.
Fait important, le 16 Septembre 2016, la compagnie annonce la date effective de son fractionnement à savoir le 30 Septembre 2016. Puis le 29 septembre 2016, la compagnie de restauration aérienne annonce une baisse de son résultat net semestriel de 46.02%.
Cette communication se fait la veille du fractionnement du titre SERVAIR. Dès le lendemain de cette publication, le titre perd 7.47% et enregistre une dégringolade de -30.72% en 8 jours.
Cette date du 29 septembre 2016 marque ainsi le début de la chute vertigineuse de l’action SERVAIR ABIDJAN. Le titre perdra ainsi 81.87% de sa valeur du 29 Septembre 2016 au 31 Décembre 2017 et perdra aussi la confiance des investisseurs en ce titre.
La mauvaise information des intervenants du marché sur l’augmentation de capital des filiales de la Bank Of Africa (BOA)
En juin 2017, les filiales de la Bank Of Africa (BOA) effectuent une série d’augmentation de capital par incorporations de primes d’émission. Ainsi que des reports à nouveau par la création d’action nouvelle et de distribution d’action gratuite.
L’annonce de BOA CI, BOA BENIN et BOA SENEGAL de procéder à la distribution gratuite d’une (1) action nouvelle pour une action ancienne à chacun de ses actionnaires, suscite un engouement chez les investisseurs.
Ces derniers, malheureusement vont mal interpréter l’opération et seront également induits en erreur par bon nombre de conseillers financiers et négociateurs/traders sur le marché.
Cette mauvaise compréhension du processus d’augmentation de capital par incorporation de réserve aurait pu être évitée avec des analystes aguerris à ce genre d’opération. Ces derniers auraient pris le soin de donner de plus amples informations à leur clientèle.
Certains intervenants du marché ont incité des investisseurs à souscrire à cette opération en méconnaissance du processus réel de l’opération.
L’amalgame fait par le marché entre CFAO MOTORS et CFAO Retail
Le 19 Décembre 2015, Le président Ivoirien Alassane Ouattara inaugure en grande pompe le premier hypermarché subsaharien du groupe français Carrefour en compagnie de plusieurs hauts responsables de CFAO et de Toyota Tsusho Corporation.
Cette ouverture crée une certaine hystérie sur la BRVM et nombreux sont ceux des intervenants du marché a considéré cette ouverture du magasin comme étant bénéfique pour CFAO MOTORS.
Un amalgame se crée entre CFAO retail qui est l’organe en charge du magasin « Playce » et CFAO MOTORS qui est chargée de la distribution des véhicules en Côte d’Ivoire. Certains négociateurs/traders incitent ainsi de nombreux investisseurs à acheter l’action CFAO Motors.
Par conséquent, le titre enregistre une croissance exponentielle et réussi même à atteindre son plus haut cours historique depuis son introduction à la bourse sur cette période à 160 000 FCFA (avant fractionnement) le 24/03/2016.
Le 25 mai 2016, soit deux (2) mois plus tard, lors de l’assemblée générale de CFAO MOTORS, le conseil d’administration de la compagnie annonce clairement que le magasin Playce ne fait pas partie de leur activité. Aussi cette forte hausse du cours de leur titre n’est pas de leur fait.
A la fin de cette AG, le cours de CFAO MOTORS commence à chuter à la bourse. En seulement 14 jours de cotations le titre va perdre 43% de sa valeur. C’était vraiment dommage pour les acheteurs qui se retrouvaient du mauvais côté de la courbe.
Dans ce cas, certains intervenants du marché (négociateur/trader) ont induit de nombreux investisseurs en erreur.
Exemple d’une excellente communication financière à la BRVM : cas de BOA Mali et ONATEL
ONATEL : Excellente réaction du management d’ONATEL
Le 04 Octobre 2016, l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARCEP) du Burkina Faso exige d’ONATEL, le règlement d’une amende de 5 milliards FCFA au plus tard le 20 octobre 2016. Sous peine de payer en plus, 100 millions FCFA par jour de retard.
Une semaine plus tard, c’est-à-dire le 12 Octobre, le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) lors d’une conférence de presse affirme que ONATEL n’aurait pas déclaré de manière sincère tous les équipements et matériels acquis par TELMOB lors de l’opération de fusion-absorption de TELMOB SA par l’ONATEL. En outre, le réseau accuse l’entreprise d’une fraude douanière évaluée à 11 milliards FCFA.
Dès l’annonce de la sanction du régulateur, le cours boursier d’ONATEL enregistre une baisse de 18.01% en 8 jours. Afin de faire face à toutes ces accusations surtout celle liée à la fraude douanière, le management d’ONATEL va émettre un communiqué le 17 octobre 2016 pour se défendre.
Cette sortie aura pour effet immédiat la limitation de la baisse du titre et permettra de ralentir la perte de valeur de l’action ONATEL.
Ainsi, Huit (8) jours après cette sortie du management, ONATEL enregistrait juste une perte de 0.20%.
Le communiqué du management avait réussi à amortir la forte baisse de l’action.
BOA MALI : Détournement de 20 milliards FCFA et réaction du management
Le 08 septembre 2016, un article publié dans un quotidien malien, fait écho d’un détournement de fonds à la BOA MALI. Cette information est rapidement reprise sur tous les sites financiers.
Les intervenants du marché financier sont stupéfaits par ce scandale qui intervient tout juste après les 100 jours de l’OPV. Et surtout après une croissance fulgurante de 181% en 1 mois de l’action.
Suite à cette information, les investisseurs commencent à se débarrasser du titre et à sécuriser au plus vite leurs investissements. L’action va perdre ainsi 44.53% de sa valeur en seulement 11 jours de cotation.
Le 27 septembre 2016, coup de théâtre ! Le management de la banque, avec une sérénité exceptionnelle publie un communiqué annonçant une hausse de +23% du résultat net du 1er semestre et confirme la bonne tendance de l’activité de la banque.
Cette communication va freiner la baisse du titre et rassurer les investisseurs sur les fondamentaux de l’entreprise. Le jour même de cette communication, le cours de l’action BOA MALI va ainsi gagner 7.49%. Le titre enregistrera également une croissance de + 29.98% en seulement 4 jours !
Soit 3 jours d’affilés à +7.50%, le lendemain de la publication.
Le communiqué sur le résultat de la banque dans un moment de panique a permis de rassurer les investisseurs quant aux fondamentaux de la banque et stabiliser le cours du titre. Un véritable coup de maître !
Recommandation sur l’amélioration de la communication financière des PME
Au vue de ces exemples, il ressort qu’il est primordial pour tout entreprise cotée d’accord un soin particulier à sa communication financière. A l’attention de ces PME qui vont entrer bientôt sur le marché financier régional, par le biais du 3e compartiment, quelques conseils pour réussir à la BRVM.
En savoir plus PME, comment réussir à La Bourse Régionale Des Valeurs Mobilières (BRVM)?
1- Produire des notes de recherches et de recommandations régulières sur les sociétés cotées.
2- Les encourager à produire des prévisions sur leurs activités (chiffres d’affaire, PER, P/B…). Ceci donnera une claire vision aux investisseurs.
3- Communiquer régulièrement l’avancée de leurs investissements aux investisseurs.
4- Toutes recommandations d’achats ou de ventes d’un gérant de fonds ou toute autre structure financière doit se faire sur la base d’une note de recherche. Le comité d’investissement d’un fonds ou d’une structure qui fait le mandat sous gestion ne peut pas se substituer à une note de recherche.
Le comité d’investissement peut statuer sur l’opportunité d’un investissement sur la base de 2 ou 3 notes de recherches.
Si une telle loi est instaurée sur notre marché, ceci emmènera toutes les SGI à se doter d’un desk de recherche. Elle permettra également la création de plus de maisons de recherches indépendantes. C’est l’un des éléments qui permettra à notre marché de tendre vers un marché efficient.
Préparé par
Daniel Aggre , analyste financier, specialiste Brvm,
et Diallo Ahmed (equity analyste à sikadvisory)
Biographie
Daniel K. AGGRE est financier de formation, titulaire d’une maîtrise en Économie pure, obtenue à l’Université de Cocody (Côte d’Ivoire) et d’un Master en Banque et Finance à London Metropolitan University en Grande Bretagne.
Il a exercé 10 ans en tant qu’analyste financier spécialité marché des actions et Commercial de produits financiers dans la Société d’information Financière, Bloomberg.
Daniel AGGRE a une très bonne connaissance des marchés financiers Africains. En tant que responsable sub-saharan ex south africa, il a développé des produits financiers pour cette région. Daniel a travaillé à la city de Londres, à Genève et sur la place financière de Dubaï.
Il organise régulièrement des séances de formations aux techniques de la bourse à Abidjan.
M. AGGRE est le Managing Director et founder du cabinet SIKAdvisory.
Apporteur d’affaire agrément AA/2018-01