La récente interdiction d’exportation de cobalt décidée par la République démocratique du Congo (RDC) commence à produire ses premiers effets. Selon Bloomberg, le groupe chinois MMG a été contraint de fermer son usine de traitement du cobalt dans la mine de Kinsevere, un peu plus d’un an après son ouverture. Cette décision met en lumière les premières répercussions économiques de la suspension des ventes à l’étranger de ce métal stratégique, utilisé notamment dans les batteries des véhicules électriques.
MMG suspend son usine après une chute des prix
La fermeture de l’usine de MMG ne date pas d’hier. L’entreprise avait déjà interrompu ses activités en décembre 2024, bien avant l’annonce officielle de l’interdiction d’exportation du cobalt congolais, en raison d’un marché dégradé. « Conditions défavorables du marché du cobalt« , a justifié la société citée par Bloomberg. En 2024, MMG n’a vendu que 1 600 tonnes de cobalt, un chiffre modeste pour un acteur de cette envergure.
Le cobalt et le cuivre sont généralement extraits ensemble en RDC, qui représente environ 75% de la production mondiale de cobalt et occupe la deuxième place pour le cuivre. MMG, détenue à 67% par le conglomérat chinois China Minmetals Corp, avait pourtant investi près de 600 millions de dollars dans l’expansion de son site de Kinsevere afin d’augmenter sa production de cuivre et de démarrer l’extraction du cobalt.
Un choc sur le marché mondial du cobalt
La décision du gouvernement congolais de suspendre ses exportations vise à enrayer l’effondrement des prix du cobalt, victime d’une surabondance de l’offre ces dernières années. La production congolaise a explosé, notamment sous l’impulsion du groupe chinois CMOC, qui a intensifié ses extractions. Cette hausse a creusé un déséquilibre entre l’offre et la demande, poussant les prix vers le bas.
Depuis la mise en place de l’interdiction, les prix du cobalt ont bondi de 33%, atteignant 7,60 dollars la livre le 5 mars 2025, selon Fastmarkets. C’est le niveau le plus élevé depuis novembre 2023.
Un signal fort du gouvernement congolais
Avec cette interdiction, Kinshasa cherche aussi à reprendre la main sur un marché où les entreprises chinoises dominent largement. L’Autorité de Régulation et de Contrôle des Marchés des Substances Minérales Stratégiques (ARECOMS) a justifié cette décision par la nécessité de stabiliser le marché et d’assurer une tarification plus équitable du cobalt congolais.
Le gouvernement envisage d’ailleurs d’aller plus loin. Des quotas d’exportation pourraient être mis en place après la levée de la suspension, afin de mieux contrôler l’offre et de limiter la volatilité des prix. Par ailleurs, Kinshasa pousse à une transformation locale accrue du cobalt, afin de capter davantage de valeur ajoutée sur place plutôt que d’exporter la matière brute.
Un tournant pour l’industrie minière en RDC ?
Cette suspension pourrait marquer un tournant pour l’industrie du cobalt en RDC. En contrôlant plus strictement ses exportations, le pays espère peser davantage sur le marché mondial et éviter que ses ressources ne soient bradées.
Mais cette stratégie comporte des risques. Si d’autres entreprises minières suivent l’exemple de MMG et ralentissent leur production, la RDC pourrait se heurter à une baisse des investissements et des revenus à court terme. Reste à voir si cette politique permettra réellement d’inverser la tendance sur les prix du cobalt, ou si elle engendrera une réaction des industriels qui préféreront diversifier leurs sources d’approvisionnement hors d’Afrique.
En attendant, la fermeture de l’usine de MMG illustre la première conséquence directe de cette nouvelle donne. Un signal qui pourrait bien en annoncer d’autres dans les mois à venir.