Chaque année, le World Happiness Report évalue le bonheur perçu dans plus de 140 pays à travers le monde. L’édition 2025, publiée par le Sustainable Development Solutions Network en partenariat avec Gallup, met une fois de plus en lumière les difficultés du continent africain à progresser dans ce classement. Si l’Afrique de l’Ouest montre quelques signes d’amélioration, la région reste globalement en bas de l’échelle mondiale, freinée par des défis structurels majeurs.
Un continent à la traîne, malgré quelques exceptions
Le classement 2025 confirme une tendance déjà observée les années précédentes : l’Afrique est le continent où les niveaux de bonheur perçu sont les plus bas. Seule l’île Maurice parvient à tirer son épingle du jeu en se classant 49ᵉ au niveau mondial et 1ʳᵉ en Afrique, grâce à une économie diversifiée, une gouvernance relativement stable et une amélioration de la qualité de vie. L’Afrique du Sud, classée 75ᵉ mondiale et 2ᵉ africaine, ainsi que l’Algérie 82ᵉ mondiale et 3ᵉ africaine, complètent le podium continental.
En Afrique de l’Ouest, les performances sont plus mitigées. La Côte d’Ivoire, malgré une croissance économique soutenue, occupe la 96ᵉ place mondiale et la 6ᵉ africaine, avec un score de 5,06. Son voisin le Ghana se classe 114ᵉ mondiale et 9ᵉ africaine (4,75), tandis que le Sénégal, réputé pour sa stabilité politique, figure à la 108ᵉ place mondiale et 8ᵉ en Afrique (4,85). À l’inverse, des pays comme le Burkina Faso (128ᵉ mondiale, 15ᵉ africaine) et le Mali (122ᵉ mondiale, 13ᵉ africaine) continuent de reculer en raison de l’instabilité sécuritaire et politique.
Les critères du bonheur : un contraste entre richesse et perception
Pour comprendre ces résultats, il est essentiel d’analyser les critères sur lesquels repose le World Happiness Report. L’indice est calculé en fonction de plusieurs indicateurs :
- – Le PIB par habitant
- – L’espérance de vie en bonne santé
- – Le soutien social (capacité à compter sur quelqu’un en cas de besoin)
- – La liberté de choix de vie
- – La générosité (dons et entraide)
- – La perception de la corruption
Un constat frappant du rapport 2025 est que la richesse économique ne garantit pas nécessairement un niveau de bonheur élevé. Par exemple, le Nigeria, qui possède l’une des plus grandes économies d’Afrique, est 106ᵉ mondial et 7ᵉ africain (4,88), mais son score est plombé par l’insécurité, la corruption et les inégalités. À l’inverse, le Bénin, avec un PIB plus modeste, atteint la 118ᵉ place mondiale et 11ᵉ africaine (4,67), en partie grâce à la résilience sociale et aux politiques de gouvernance améliorées.
Un fossé qui se creuse entre les pays africains
Comparé à l’édition 2024, le classement 2025 révèle un écart croissant entre les nations africaines les mieux classées et celles en difficulté. Maurice continue de progresser grâce à une reprise du tourisme et à une stabilité économique renforcée. L’Afrique du Sud, malgré ses défis internes, parvient à maintenir sa position dans le top 80 mondial.
En Afrique de l’Ouest, la Côte d’Ivoire gagne quelques places, mais son score reste inférieur à la moyenne mondiale, soulignant que la croissance économique ne se traduit pas automatiquement par une amélioration du bien-être. De leur côté, le Burkina Faso et le Mali subissent une détérioration continue, impactés par les conflits armés et les crises institutionnelles.
D’autres pays affichent des évolutions contrastées. Le Togo, autrefois l’un des derniers du classement, progresse légèrement en atteignant la 121ᵉ place mondiale et 12ᵉ africaine (4,62), tandis que la Guinée reste en difficulté à la 125ᵉ place mondiale et 14ᵉ africaine (4,51).
Des perspectives d’amélioration à long terme
Le rapport 2025 insiste sur l’importance de la cohésion sociale et de la gouvernance pour améliorer le bien-être perçu. L’entraide et la solidarité restent des atouts majeurs en Afrique de l’Ouest, en particulier au Sénégal et au Ghana, où l’esprit communautaire joue un rôle clé dans l’atténuation des difficultés économiques.
Cependant, la région doit encore relever des défis majeurs pour espérer progresser durablement dans ce classement :
✔ Réduction des inégalités économiques : La concentration des richesses et le coût de la vie élevé empêchent une large partie de la population de ressentir les bénéfices de la croissance.
✔ Amélioration des services publics : L’accès à la santé et à l’éducation reste insuffisant dans de nombreux pays, limitant le potentiel de développement humain.
✔ Stabilité politique et lutte contre la corruption : Les pays où la confiance dans les institutions est plus forte enregistrent généralement un bonheur perçu plus élevé.
L’enjeu est de taille : au-delà du simple classement, le bonheur perçu est un indicateur clé du développement humain. Pour l’Afrique de l’Ouest, la priorité sera donc de combiner croissance économique et inclusion sociale afin de réduire l’écart avec le reste du monde.
Classement des pays africains dans le World Happiness Report 2025
Rang africain | Pays | Rang mondial | Score | Commentaires |
1 | Maurice | 50 | 6,31 | Stabilité politique, économie diversifiée et qualité de vie élevée. |
2 | Libye | 63 | 5,91 | Résilience notable malgré les défis post-conflit. |
3 | Algérie | 73 | 5,62 | PIB par habitant élevé et sentiment de soutien social. |
4 | Afrique du Sud | 85 | 5,32 | Économie développée mais inégalités marquées. |
5 | Mozambique | 91 | 5,15 | Progrès économiques et sociaux modestes, malgré des défis structurels. |
6 | Gabon | 94 | 5,09 | Ressources pétrolières et faible densité de population. |
7 | Côte d’Ivoire | 96 | 5,06 | Croissance économique rapide, mais inégalités et instabilité passée. |
8 | Congo (Rép. du Congo) | 98 | 5,03 | Ressources naturelles abondantes, mais gouvernance faible. |
9 | Guinée | 100 | 4,98 | Améliorations récentes dans les infrastructures et la stabilité. |
10 | Namibie | 102 | 4,95 | Stabilité politique et paysages naturels, mais défis économiques. |
11 | Cameroun | 104 | 4,91 | Diversité culturelle, mais tensions régionales. |
13 | Nigeria | 106 | 4,88 | Puissance économique, mais insécurité et corruption. |
14 | Sénégal | 108 | 4,85 | Stabilité et cohésion sociale fortes, malgré un PIB modeste. |
15 | Niger | 110 | 4,81 | Résilience communautaire dans un contexte de pauvreté et d’insécurité. |
16 | Maroc | 112 | 4,78 | Progrès en tourisme et infrastructure, mais inégalités régionales. |
17 | Ghana | 114 | 4,75 | Démocratie stable, mais défis économiques persistants. |
18 | Ouganda | 116 | 4,71 | Croissance démographique rapide et défis en santé publique. |
19 | Bénin | 118 | 4,67 | Stabilité politique, mais faible développement économique. |
20 | Tunisie | 120 | 4,63 | Transition démocratique difficile et ralentissement économique. |
21 | Mali | 122 | 4,59 | Conflits et instabilité entravent le bien-être. |
22 | Kenya | 124 | 4,54 | Dynamisme économique, mais inégalités et tensions sociales. |
23 | Égypte | 126 | 4,49 | Grande population et défis socio-économiques. |
24 | Burkina Faso | 128 | 4,44 | Insécurité croissante et crises humanitaires. |
25 | Comores | 130 | 4,39 | Petite nation insulaire avec des ressources limitées. |
26 | Togo | 132 | 4,34 | Progrès lent dans le développement humain. |
27 | Éthiopie | 134 | 4,29 | Croissance économique, mais conflits internes. |
28 | Madagascar | 136 | 4,24 | Biodiversité riche, mais pauvreté endémique. |
29 | Zambie | 138 | 4,19 | Stabilité relative, mais dépendance aux matières premières. |
30 | Sierra Leone | 140 | 3,95 | Rétablissement post-guerre civile, mais défis persistants. |
31 | Tchad | 141 | 3,87 | Pauvreté extrême et instabilité régionale. |
32 | Lesotho | 142 | 3,79 | Enclavement et défis sanitaires. |
33 | Zimbabwe | 143 | 3,67 | Crises économiques et politiques prolongées. |
Cette nouvelle édition du World Happiness Report confirme les défis persistants pour l’Afrique de l’Ouest, mais aussi quelques signes encourageants. Si certains pays progressent légèrement, la majorité peine à suivre la dynamique mondiale. Pour inverser la tendance, la région devra s’attaquer aux inégalités, renforcer ses institutions et garantir une croissance plus inclusive. Le bonheur ne se résume pas au PIB : c’est avant tout une question de gouvernance et de justice sociale.
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