Les États membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) ont levé 6993,75 milliards FCFA (12,5 milliards $) sur le marché régional des titres publics au cours du premier semestre 2025. Selon les données publiées par l’Agence UMOA-Titres, ce volume marque une hausse de 84,3 % par rapport à la même période l’an dernier.
Cette progression s’explique en grande partie par le fort rebond des émissions d’obligations assimilables du Trésor (OAT), en hausse de 154,9 % sur un an. Ces instruments de long terme représentent désormais près de la moitié des ressources mobilisées. Une évolution qui contraste avec l’année 2024 durant laquelle la forte tension de liquidité sur le marché régional avait contraint les Etats à concentrer leurs émissions sur des maturités très courtes. Les bons assimilables du Trésor (BAT), à court terme, ont quant à eux progressé de 47,5 % sur la période.
Parallèlement, le nombre d’adjudications a fortement augmenté, atteignant 125 opérations depuis le début de l’année, soit près de 39 % de plus qu’en 2024. Les remboursements de dette, eux, ont doublé pour s’établir à 4990,29 milliards FCFA, reflétant une accumulation d’échéances arrivées à maturité.
Malgré cette intense activité, l’encours global de la dette des Etats membres n’a progressé que de 1,58 %, pour atteindre 20 536,52 milliards FCFA à fin juin. Un chiffre qui laisse penser que les émissions ont essentiellement servi à refinancer des dettes arrivées à échéance, plutôt qu’à accroître significativement le niveau d’endettement net.
Parmi les Etats les plus actifs, la Côte d’Ivoire reste le principal emprunteur, avec plus de 3131,5 milliards FCFA levés, soit 44 % du total régional. Le Sénégal arrive en deuxième position avec 1262,5 milliards FCFA, en hausse de 267 % sur un an. Cette dynamique s’explique par la suspension du programme avec le FMI et les difficultés d’accès aux marchés financiers internationaux, dans un contexte marqué par la découverte d’une dette non déclarée. Le pays enregistre également la plus forte hausse de son encours de dette sur la période (+5,7 %). A l’inverse, la dette du Togo a reculé de 2,9 %, tandis que celles du Bénin et de la Côte d’Ivoire ont progressé respectivement de 2,28 % et 1,46 %.
L’intensification du recours au marché régional s’inscrit dans un contexte macroéconomique en amélioration. La croissance du PIB réel de l’UEMOA est attendue à 6,4 % en 2025, contre 6,3 % en 2024, portée par le rebond de l’activité dans les secteurs extractif, manufacturier et agricole. L’inflation moyenne, en nette décrue, s’est établie à 2,2 % au premier semestre, ce qui a permis à la BCEAO de réduire son principal taux directeur de 25 points de base, à 3,25 %, en juin. Cette inflexion de la politique monétaire vise à soutenir la demande sur le marché obligataire tout en réduisant le coût de financement pour les États.
Mais tous les émetteurs ne bénéficient pas du même traitement. Les rendements à l’émission varient fortement selon les pays. Le Bénin, le Togo ou encore le Sénégal bénéficient d’un repli ou d’une stabilisation de leurs taux sur l’ensemble des maturités. A l’inverse, le Niger, le Mali et la Guinée-Bissau doivent offrir des primes de risque plus élevées pour attirer les investisseurs. Le cas du Niger est révélateur : ses émissions à trois mois ont atteint un taux de 11,99 %, contre 8,56 % un an plus tôt, sur fond d’isolement diplomatique et de transition politique prolongée. La Côte d’Ivoire, elle, continue de bénéficier d’un accès fluide, avec des taux stables sur toutes les maturités.
Si la politique monétaire plus accommodante de la BCEAO pourrait continuer d’alléger la pression sur les taux au second semestre, la sélectivité des investisseurs reste forte, et les arbitrages s’opèrent de plus en plus sur la base de critères structurels : discipline budgétaire, stabilité institutionnelle et trajectoire de croissance à moyen terme.
Avec Agence ecofin