Le dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI) sur la Namibie souligne un paradoxe : bien que le pays affiche une croissance économique attendue de 3,5% pour 2024, il demeure confronté à des défis structurels majeurs. Si la reprise semble se dessiner dans certains secteurs, elle reste fragilisée par des problèmes persistants en matière de chômage, d’insécurité alimentaire et de déficits budgétaires. Le pays pourrait-il réussir à capitaliser sur sa reprise tout en abordant ces enjeux sociaux et économiques cruciaux ?
Une croissance fragile, dépendante des matières premières
L’économie de la Namibie, bien qu’en croissance, reste largement tributaire des secteurs pétroliers et gaziers ainsi que de l’exploitation minière, en particulier des diamants. En 2023, la croissance a été freinée par une baisse de la demande mondiale de diamants et une grave sécheresse. Toutefois, la situation devrait s’améliorer à court terme, avec une prévision de croissance de 4% pour 2025, soutenue par la reprise du secteur agricole et l’extension des investissements dans l’industrie pétrolière.
Cependant, ce rebond est fragile. La dépendance à l’exportation de matières premières expose l’économie namibienne à des fluctuations externes, rendant la reprise vulnérable à des chocs mondiaux, notamment des baisses de prix ou des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement. Pour que cette croissance devienne durable, il faudra diversifier davantage les sources de revenus du pays et ne pas se contenter d’une dynamique dictée par les cycles des matières premières.
Chômage et inégalités : des défis sociaux urgents
Le chômage demeure un problème majeur en Namibie, avec un taux atteignant 36,9% en 2023, un des plus élevés au monde. Le FMI souligne qu’il est crucial d’augmenter la création d’emplois dans le secteur privé pour réduire cette pression sociale. À cet égard, il préconise une réforme de la réglementation du travail afin de faciliter l’entrepreneuriat et encourager les investissements privés.
En parallèle, l’insécurité alimentaire, exacerbée par la sécheresse, touche près de 50% de la population. Cette situation alimentaire précaire, combinée à un chômage élevé, fait peser un lourd fardeau sur les finances publiques, notamment à travers les aides d’urgence et les subventions alimentaires qui restent une nécessité à court terme. Le maintien de ces aides, tout en cherchant à améliorer leur efficacité, est une priorité pour le gouvernement.
La situation budgétaire : une gestion sous haute tension
Le rapport du FMI met également en lumière les défis fiscaux qui se profilent pour la Namibie. Le déficit budgétaire devrait s’aggraver, atteignant 3,0% du PIB en 2024/25, contre 2,4% en 2023/24. Cette détérioration est alimentée par une augmentation des dépenses publiques, principalement pour financer les salaires du secteur public et l’aide d’urgence.
Le FMI recommande une gestion prudente des finances publiques, en particulier en ce qui concerne la masse salariale et les investissements publics. Il soulève également l’importance de rationaliser les dépenses publiques, notamment en matière d’infrastructures. Si les investissements dans des secteurs comme l’énergie, les transports et l’eau sont cruciaux pour stimuler la croissance à long terme, ils doivent être réalisés de manière plus ciblée et efficiente, afin de maximiser leur impact économique.
Stabilité financière et vulnérabilités externes
Sur le plan monétaire, l’inflation, modérée à 4% en 2025, reste maîtrisable. Cela permet à la Banque de Namibie de mener une politique monétaire relativement souple, avec une possibilité de réduction des taux d’intérêt. Cependant, le pays fait face à un déficit de son compte courant, qui devrait atteindre 16% du PIB en 2024, en grande partie en raison des importations massives liées à l’exploration pétrolière.
Bien que les réserves de change restent relativement solides, représentant environ 4,5 mois d’importations en 2024, cette position pourrait se détériorer rapidement si le pays ne parvient pas à réduire sa dépendance aux importations. Par ailleurs, la Namibie reste vulnérable à des perturbations externes, notamment une hausse des prix du pétrole ou des tensions commerciales mondiales qui pourraient exacerber le déficit courant.
Réformes structurelles : un impératif pour une croissance inclusive
Pour garantir une croissance plus inclusive et durable, le FMI appelle à des réformes structurelles ambitieuses. Cela inclut la simplification des procédures administratives, la digitalisation de la fonction publique et l’amélioration du climat des affaires. En facilitant l’accès au marché et en réduisant les coûts liés à la bureaucratie, la Namibie pourrait stimuler davantage son secteur privé et attirer des investissements étrangers.
Cependant, ces réformes ne seront efficaces que si elles sont accompagnées d’une politique sociale proactive. La réduction des inégalités et l’amélioration des conditions de travail des Namibiens sont des priorités tout aussi cruciales. Une attention particulière doit être portée à la protection sociale, afin de garantir que la croissance profite réellement à tous les citoyens, notamment les plus vulnérables.
Une croissance fragile mais potentiellement durable ?
La Namibie fait face à des défis majeurs, mais le pays a également des opportunités. Si la croissance attendue à court terme est encourageante, elle doit être suivie d’une transformation structurelle de l’économie, qui permette de diversifier les sources de revenus et d’atténuer les inégalités. La gestion des finances publiques, l’amélioration de l’infrastructure, et la mise en place de réformes structurelles robustes seront déterminantes pour garantir que la croissance bénéficiera à l’ensemble de la population.
Ainsi, la Namibie doit impérativement passer d’une croissance volatiles à un développement plus inclusif et durable. La résilience face aux chocs climatiques, l’optimisation des ressources et un secteur privé plus dynamique seront les clés d’une Namibie prospère à long terme.