Avec 5,3% de croissance au premier trimestre, le Ghana redémarre sans corriger ses faiblesses

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Avec 5,3% de croissance au premier trimestre, le Ghana redémarre sans corriger ses faiblesses
Avec 5,3% de croissance au premier trimestre, le Ghana redémarre sans corriger ses faiblesses

Le Ghana enregistre une accélération notable de sa croissance économique. Au premier trimestre 2025, le produit intérieur brut (PIB) a progressé de 5,3% en glissement annuel, contre 4,9% au cours de la même période en 2024. Cette performance, annoncée par le statisticien national Alhassan Iddrisu, traduit une embellie encourageante dans un pays encore marqué par les séquelles d’une crise de la dette récente. Si les moteurs de cette croissance sont clairement identifiés – les services et l’agriculture –, le tableau global révèle également des faiblesses structurelles que les autorités devront rapidement adresser.

Les services en tête, dopés par le numérique et la finance

Avec une croissance de 5,9%, le secteur des services confirme sa place de premier contributeur à l’activité économique, représentant environ 47% du PIB. L’expansion est portée par les technologies de l’information et de la communication, qui bondissent de 13,1%, les services financiers (+9,3%) et les transports (+8,6%). Cette tendance confirme la montée en puissance d’une économie urbaine et connectée, où les services numériques et bancaires soutiennent la reprise.

Une agriculture vigoureuse malgré les incertitudes climatiques

Deuxième contributeur majeur, l’agriculture surprend par sa résilience, avec une croissance de 6,6%. Elle pèse 23,5% du PIB et emploie environ un tiers de la population active. Ce dynamisme provient principalement de la pêche (+16,4%) et de la production agricole, notamment le cacao (+3,4%), qui reste un pilier des exportations. Les cultures agricoles dans leur ensemble progressent de 6,7%, tandis que l’élevage affiche une hausse de 5,6%. Ces résultats signalent des gains de productivité et une meilleure adaptation des exploitations agricoles aux aléas climatiques, sans que les politiques spécifiques ayant permis ces progrès ne soient détaillées pour l’instant.

L’industrie freinée par le recul pétrolier

En retrait par rapport aux autres secteurs, l’industrie ne progresse que de 3,4%, alors qu’elle représente 29,7% du PIB. L’industrie manufacturière affiche un bon rythme (+6,6%), mais ce dynamisme est fortement contrebalancé par le ralentissement de l’extraction minière (+1,4%) et surtout par la chute brutale du secteur pétrolier et gazier (–22,1%). La baisse de production de brut pèse lourdement sur les comptes extérieurs et reflète la vulnérabilité du Ghana aux chocs du marché énergétique mondial. L’approvisionnement en eau et l’assainissement, en repli de 3,7%, témoigne aussi de fragilités en matière d’infrastructures de base.

Une croissance plus robuste hors pétrole

En excluant le secteur pétrolier, la performance globale apparaît plus solide. Le PIB non pétrolier progresse de 6,8%, confirmant une dynamique portée par la diversification de l’économie. En variation trimestrielle corrigée des variations saisonnières, l’économie ghanéenne affiche une progression de 1,4%, contre 0,9% au dernier trimestre 2024. Ce rebond repose essentiellement sur les services (+1,5%) et l’agriculture (+1,7%).

Le secteur public à la peine, des signaux d’alerte à ne pas négliger

Tous les secteurs ne profitent pas de cette dynamique. L’administration publique, l’éducation et la foresterie enregistrent des reculs, avec une contraction marquée de 4,2% pour les activités gouvernementales. Cette évolution pourrait traduire des réductions budgétaires, alors que le pays continue de négocier avec ses créanciers après le défaut de paiement de 2022. Dans un pays où l’État reste un employeur important et un acteur central de l’économie, cette tendance constitue un risque pour la cohésion sociale et la reprise à moyen terme.

Une demande intérieure active, mais un commerce extérieur fragilisé

Côté demande, la consommation reste un pilier de la croissance. Les dépenses publiques augmentent de 8,2%, tandis que la consommation des ménages progresse de 4%. En revanche, les investissements, mesurés par la formation brute de capital, évoluent plus lentement (+1,1%). Les exportations nettes, elles, se contractent, alourdissant un déficit commercial accentué par la baisse des revenus pétroliers. Cette détérioration de la balance commerciale exerce une pression persistante sur le cedi, la monnaie nationale, déjà affaibli par les tensions inflationnistes de ces dernières années.

Reprise confirmée, mais pas encore consolidée

Le retour à une croissance supérieure à 5% constitue sans doute un signal positif pour le Ghana, qui cherche à se redresser après une décennie d’instabilité macroéconomique. Le soutien du Fonds monétaire international (FMI), dans le cadre d’un programme de redressement budgétaire et de réforme, a joué un rôle de levier. Mais cette reprise reste fragile : les déséquilibres commerciaux, le repli du secteur public, et surtout la dépendance persistante au pétrole rendent l’économie vulnérable. Le défi des prochains trimestres sera de transformer cette embellie conjoncturelle en une croissance durable et inclusive.

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