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  • 22/10/2025

Appian-IFC : 1 milliard de dollars pour dompter les minerais critiques — opportunité ou test de crédibilité pour l’Afrique ?

Appian Capital Advisory et l’International Finance Corporation (IFC) annoncent le lancement d’un véhicule d’investissement dédié aux minerais et métaux critiques dans les marchés émergents, avec un objectif de jusqu’à 1 milliard de dollars de capitaux. L’IFC s’engage à hauteur de 100 millions de dollars en tant qu’investisseur d’ancrage (ou anchor investor) — c’est-à-dire qu’elle entre en premier dans le fonds pour en crédibiliser le lancement et attirer d’autres investisseurs vers l’objectif total. Le reste devrait être mobilisé par l’IFC Asset Management Company et d’autres investisseurs institutionnels.

 

Le fonds, géré par Appian, investira en equity, crédit et royalties et se focalisera sur des commodités essentielles à la transition énergétique et aux technologies numériques — nickel, cuivre, cobalt, terres rares, etc. L’angle revendiqué : générer des rendements financiers solides tout en produisant un impact de développement (création d’emplois, recettes publiques, renforcement des capacités locales).

 

Michael W. Scherb, fondateur et CEO d’Appian, a souligné que l’accord représente « une forte endorsement de notre capacité à identifier et développer des actifs de qualité, en libérant de la valeur à long terme pour nos partenaires ». Makhtar Diop, Managing Director de l’IFC, a déclaré : « Les minerais sont essentiels pour construire des industries, créer des emplois et stimuler la croissance économique. Partenariats comme celui-ci permettront d’attirer davantage de capitaux privés vers les régions qui en ont le plus besoin. » Ces déclarations proviennent du communiqué officiel publié par Appian.

 

Le premier investissement annoncé est une co-investissement sur la mine Santa Rita (Atlantic Nickel) au Brésil — un actif en production que Appian veut développer vers une production souterraine de plus longue durée, avec une montée en puissance envisagée autour de ~30 000 tonnes équivalent-nickel par an et une durée de vie dépassant 30 ans. Ce choix du Brésil comme première opération illustre la stratégie du fonds : combiner actifs existants et expansions pour réduire le risque d’entrée.

 

Pourquoi l’Afrique regarde (et doit regarder) de près

 

1.   Potentiel d’attractivité : l’Afrique détient d’importants gisements de cobalt, de terres rares, et d’autres minerais recherchés. L’existence d’un fonds dédié aux marchés émergents ouvre une fenêtre d’opportunité pour lever des financements structurés et techniques.

2.   Conditions à poser : pour que l’Afrique capte ces flux, il faut des cadres clairs (fiscalité, cadastre), des garanties ESG crédibles et des partenariats locaux solides. L’IFC impose ses standards ESG — mais l’efficacité dépendra de la mise en œuvre sur le terrain.

3.   Risques : les investisseurs privés cherchent le rendement ; les États et communautés cherchent des retombées durables. Sans gouvernance et surveillance, le risque d’externalités sociales et environnementales persiste.

 

Ce que les gouvernements et les acteurs locaux doivent exiger

 

  • Transparence contractuelle : publication des termes-clés des accords (projets, royalties, engagements de transfert de compétences).
  • Clauses ESG contraignantes : indicateurs mesurables et auditables, y compris pour la chaîne d’approvisionnement en aval.
  • Plan de développement local : formation, priorisation des emplois locaux, investissements dans l’infrastructure.
  • Mécanismes de partage des revenus : pour que les recettes minières financent santé, éducation et infrastructures.

 

Le partenariat Appian-IFC est un signal clair : les marchés émergents reviennent au cœur des stratégies d’approvisionnement en minerais critiques, notamment en réponse aux enjeux géopolitiques et à la transition énergétique. C’est une opportunité réelle pour l’Afrique, à condition que pays et communautés exigent gouvernance, transparence et bénéfices partagés. Sans cela, le déploiement rapide de capitaux risque d’engendrer des tensions socio-environnementales plutôt que des dividendes de développement.