Dans les villages cacaoyers, le débat n’est plus technique. Il est vital.
Alors que le Conseil du Café-Cacao (CCC) assure que la campagne 2025-2026 est
bien engagée, avec 70% de la production acheminée vers les ports et 2 800
milliards de FCFA déjà distribués aux producteurs, les voix qui montent du
terrain racontent une autre histoire. Une histoire faite d’attente, de méfiance
et d’argent qui tarde à arriver.
Cette fracture entre communication institutionnelle et
vécu paysan s’est cristallisée après la sortie publique de la plateforme
SYNAPCI–ANAPROCI, qui a accusé le CCC de blocages dans la commercialisation et
exigé la démission de son directeur général. En réponse, le régulateur a opposé
des chiffres, des volumes et des flux portuaires, affichant une filière qu’il
juge maîtrisée et en voie de stabilisation.
Mais sur le terrain, l’équation est moins rassurante.
À Sipilou, dans l’Ouest ivoirien, les sacs de cacao
sont bien là. L’argent, beaucoup moins. « Les acheteurs ne viennent presque
pas. Quand ils passent, ils promettent de revenir nous payer. Cela fait deux
mois que nous attendons », confie N’guéssan N’Dri, producteur de café-cacao. La
crainte de livrer sans être payé alimente une paralysie silencieuse. Résultat :
des stocks qui s’accumulent et une campagne que certains qualifient déjà
d’échec.
Même constat à Guého. Les magasins sont pleins, mais
les familles manquent de liquidités. « Les fêtes ont été très difficiles. Tout
ce que nous avions a servi à payer l’école des enfants », explique Coulibaly
Bamori. Faute de revenus issus du cacao, les ménages se replient sur des
cultures vivrières ou de petits métiers. Une stratégie de survie, pas un choix
économique.
Dans la Marahoué, à Bouaflé, le problème ne se limite
pas à la lenteur des ventes. Certains producteurs assurent avoir livré leur
cacao depuis novembre, sans avoir perçu le moindre paiement. « Une partie est
au port, une autre au magasin, mais rien n’est tombé », témoigne Loukou Kouassi
Augustin. Les conséquences sont immédiates : enfants renvoyés de l’école, soins
médicaux reportés, précarité accrue dans des zones où le cacao reste la
principale, voire l’unique, source de revenus.
À Dabouyo, le tableau est tout aussi sombre. Des
camions seraient immobilisés depuis plusieurs semaines après dépôt de
cargaison. « Le cacao est là, mais les planteurs souffrent. Et personne ne nous
explique ce qui se passe », déplore Kouakou Francis. Le sentiment d’abandon
nourrit une colère diffuse, d’autant plus vive que la période des fêtes
approche.
Ces témoignages, recueillis dans plusieurs régions de
production, mettent en lumière un décalage central : l’acheminement du cacao
vers les ports ne garantit pas un paiement rapide et effectif aux producteurs.
Autrement dit, la performance logistique affichée par le CCC ne suffit pas à
dissiper la crise de trésorerie vécue dans les villages.
C’est précisément ce point que soulignaient déjà les
responsables du SYNAPCI et de l’ANAPROCI lors de leur conférence de presse.
Selon eux, la filière ne souffre pas d’un problème de production, mais d’un
dysfonctionnement de la commercialisation et du financement, aggravé par des
lenteurs administratives et un manque de confiance entre producteurs et
acheteurs.
Face à ces critiques, le CCC met en avant les
sanctions contre les acheteurs véreux, l’amélioration de la fluidité des
opérations et la montée en puissance de l’Organisation interprofessionnelle
agricole (OIA), présentée comme un cadre légitime de dialogue. Sur le papier,
les instruments existent. Sur le terrain, les producteurs attendent surtout des
résultats concrets : être payés, et être payés à temps.
À l’heure où l’ultimatum lancé par la plateforme SYNAPCI–ANAPROCI
arrive à échéance, la tension reste palpable dans les zones cacaoyères.
Derrière la bataille de chiffres et de légitimité, une question demeure entière
: comment une filière qui revendique des milliards distribués peut-elle laisser
une partie de ses producteurs sans revenus pendant plusieurs mois ?
Tant que cette interrogation restera sans réponse
claire, le fossé entre gouvernance et monde rural continuera de se creuser. Et
dans une économie où le cacao fait vivre des millions de personnes, ce fossé
n’est pas seulement économique. Il est social, et potentiellement explosif.
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