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  • 31/10/2025

Mali : Coup de balai dans les mines — plus de 90 permis révoqués pour non-conformité

Le gouvernement malien a décidé de faire le ménage dans son secteur minier. Selon un décret signé le 13 octobre par le ministre des Mines, Amadou Keïta, et consulté par Reuters, plus de 90 permis d’exploration ont été annulés pour non-conformité avec la nouvelle réglementation. Parmi les sociétés concernées figurent des filiales locales de Harmony Gold, IAMGOLD, Cora Gold, Birimian Gold et Resolute Mining.

 

« Les titulaires de permis ont été invités à soumettre les documents requis en vertu de la nouvelle réglementation minière, mais après vérification, les autorités ont constaté des cas de non-conformité généralisés », a expliqué le ministère des Mines dans un communiqué publié mercredi.

 

Une opération de “nettoyage administratif”

 

Le décret, examiné par Reuters le 29 octobre, annule les titres délivrés entre 2015 et 2022 pour l’exploration de l’or, du fer, de la bauxite, de l’uranium, des terres rares et d’autres minerais stratégiques.
Les zones concernées sont désormais « ouvertes à la réattribution ». Aucun détail n’a été fourni sur la superficie totale des concessions ni sur la valeur des projets suspendus.

 

Certaines entreprises ont minimisé l’impact de cette décision. Cora Gold, par exemple, a indiqué avoir renoncé aux permis concernés depuis plus de deux ans, ajoutant que cette annulation tardive « n’a aucune incidence sur ses activités et ne justifie pas de réponse ».

 

Un virage réglementaire à l’échelle du continent

 

La décision malienne s’inscrit dans une tendance continentale. La Guinée, la Tanzanie ou encore la RDC ont récemment révisé leurs codes miniers pour reprendre la main sur des actifs jugés sous-exploités ou mal encadrés.
Objectif affiché : accroître les revenus tirés des ressources naturelles et renforcer la souveraineté économique. Mais ce durcissement réglementaire soulève des inquiétudes dans les milieux d’affaires, qui redoutent une incertitude juridique nuisible aux investissements à long terme.

 

Entre ambitions souveraines et défis économiques

 

Le Mali, l’un des plus grands producteurs d’or d’Afrique, dépend fortement de ce secteur pour ses recettes d’exportation.
Mais l’exploitation est aujourd’hui fragilisée par l’insécurité persistante, la baisse de production — notamment à la mine Loulo-Gounkoto de Barrick — et une réorientation stratégique du pouvoir vers des partenariats avec la Russie, incluant des projets miniers et énergétiques.

 

Le pays a récemment signé un accord pour la fourniture de 160 000 à 200 000 tonnes de pétrole et de produits agricoles en provenance de Russie, dans un contexte de blocus des carburants imposé par des groupes armés.
Cette coopération s’ajoute à des coentreprises minières et à la construction d’une raffinerie d’or d’État à Bamako, marquant un tournant vers une économie plus contrôlée par le gouvernement.

 

Un équilibre délicat à trouver

 

En annulant ces permis, Bamako affiche sa volonté de remettre de l’ordre dans un secteur jugé opaque.
Mais cette opération de “nettoyage administratif” pourrait refroidir certains investisseurs étrangers déjà échaudés par l’instabilité politique et sécuritaire.
Le défi, pour les autorités, sera désormais de transformer cette rigueur réglementaire en levier de crédibilité plutôt qu’en facteur de méfiance.