« Un cadre juridique stable est essentiel pour assurer la confiance des bailleurs de fonds et des investisseurs dans un PPP » François de Senneville, Partner ‑ Head Africa Desk – Fieldfisher (Partie 2)

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François de Senneville est Associé et en charge du Groupe Afrique au sein du bureau parisien de Fieldfisher. Reconnu pour son expertise en matière de fiscalité internationale, et de droit des affaires africain (notamment OHADA), il assiste depuis plus de 25 ans de grands grou,pes internationaux dans leurs projets de développement, de réorganisation de leurs activités internationales et de structuration de leurs acquisitions. Dans cette interview, il livre son analyse sur les spécificités juridiques du financement de projets d’infrastructures. 

Existe-t-il une régulation juridique des PPP dans le cadre de l’OHADA ? Si non, comment les investisseurs peuvent-ils sécuriser juridiquement un PPP contre les risques politiques ou sécuritaires ?

L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) ne dispose pas d’un cadre juridique spécifique aux PPP. Cependant, des principes de base en matière de contrats et de procédures sont applicables, ce qui permet de sécuriser une partie des aspects juridiques des PPP. Pour sécuriser juridiquement un PPP contre les risques politiques ou sécuritaires, les investisseurs peuvent inclure des clauses de protection dans les contrats, telles que des garanties contre l’expropriation, des clauses de résiliation anticipée pour cause de force majeure, ou des assurances contre les risques politiques. Les investisseurs peuvent également chercher à inclure des mécanismes de résolution de conflits tels que l’arbitrage international.

Quelles sont, selon vous, les conditions pour que les PPP soient en Afrique, une option économiquement viable pour la fourniture d’infrastructures publiques ?

Avant tout, je dirai qu’un cadre juridique transparent et prévisible, ainsi qu’une stabilité politique, sont essentiels pour rassurer les investisseurs et garantir la pérennité des projets. Par ailleurs, les gouvernements doivent mettre en place des mécanismes pour partager équitablement les risques entre le secteur public et le secteur privé, notamment les risques liés à la monnaie, à la politique, et aux catastrophes naturelles. Pour que ces projets soient viables en Afrique, les gouvernements doivent également disposer des compétences et des ressources nécessaires pour gérer ces projets, notamment en matière de supervision et de contrôle des contrats. Enfin, nous le soulignons précédemment, des mécanismes de transparence sont indispensables pour garantir que ces projets sont menés de manière efficace et honnête.

Quelles sont les modalités de règlement des différends dans les projets d’infrastructures ?
Entre le recours à l’arbitrage (institutionnel ou ad hoc) et un mode alternatif de règlement des litiges, lequel est le plus souvent privilégié ? Pourquoi ?

Le règlement des différends dans les projets d’infrastructures se fait généralement par un arbitrage (institutionnel ou ad hoc). Cette approche pour la résolution des disputes est privilégiée dans la plupart des projets d’infrastructures en raison de sa capacité à offrir une solution rapide, impartiale et souvent plus efficace que les systèmes judiciaires nationaux, surtout dans les pays où les systèmes judiciaires peuvent être lents ou manquent d’indépendance. Notons que bien que moins courants que l’arbitrage, les modes alternatifs de règlement des différends, comme la médiation ou la conciliation, peuvent être utilisés pour résoudre les conflits à l’amiable. Mais l’arbitrage est généralement préféré car il permet aux parties de choisir des arbitres spécialisés dans les questions complexes liées aux infrastructures, ce qui peut conduire à une résolution plus rapide et plus technique des différends.

La Côte d’Ivoire est souvent montrée en exemple en matière de PPP en Afrique francophone.
Pensez-vous que la législation ivoirienne régissant les PPP est adaptée ? Donne-t-elle aux bailleurs de fonds et aux investisseurs potentiels les assurances voulues ?

La législation ivoirienne en matière de PPP est relativement bien développée, notamment avec la loi N° 2014-451 du 05 août 2014 relative aux contrats de PPP, qui encadre la mise en place et la gestion des PPP en Côte d’Ivoire. Cette législation offre un cadre juridique relativement sécurisé pour les investisseurs, avec des garanties concernant la transparence et la gestion des contrats. Pour autant, des défis subsistent concernant la mise en œuvre effective de cette législation et la gestion des risques politiques ou économiques. Les investisseurs peuvent chercher à sécuriser leurs investissements en incluant des clauses spécifiques dans les contrats, comme des assurances contre les risques politiques ou des garanties de performance. En d’autres mots, bien que la législation ivoirienne fournisse un cadre juridique adapté aux PPP, des efforts supplémentaires dans le temps restent nécessaires pour garantir la sécurité juridique des investisseurs et assurer la mise en œuvre efficace des projets.

Avec Business Africa