Dette éthiopienne : un allégement de 8,4 milliards de dollars, mais des défis persistants

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Acculée par une dette extérieure écrasante et des difficultés économiques persistantes, l’Éthiopie vient d’obtenir un répit financier. Le gouvernement a conclu un accord avec ses créanciers bilatéraux pour restructurer 8,4 milliards de dollars de dette, dans le cadre du Common Framework du G20. Une décision cruciale qui devrait permettre au pays de réduire ses obligations de remboursement de 2,5 milliards de dollars d’ici 2028.

Dans un communiqué officiel, le ministère des Finances a salué cette avancée, affirmant que « cet allègement donnera au gouvernement les moyens de financer des investissements publics essentiels ». Mais cette restructuration est-elle suffisante pour remettre l’économie éthiopienne sur les rails ?

Pourquoi Addis-Abeba devait renégocier sa dette ?

L’Éthiopie traverse une crise économique marquée par une dette publique élevée et un manque criant de devises étrangères. En juin 2024, la dette totale du pays atteignait 68,86 milliards de dollars, soit environ 33% du PIB. Parmi ce montant, 28,89 milliards de dollars sont dus à des créanciers étrangers, principalement la Chine, qui détient une part significative des prêts bilatéraux.

Ces difficultés ont été aggravées par plusieurs facteurs. D’abord, la guerre du Tigré (2020-2022) a pesé lourdement sur les finances publiques. Ensuite, une forte inflation, alimentée par la dépréciation du birr éthiopien, a réduit le pouvoir d’achat et augmenté le coût des importations. Enfin, la pénurie de devises étrangères rend les importations de biens essentiels plus coûteuses et complique le remboursement des engagements financiers du pays.

Face à cette situation, le Fonds monétaire international (FMI) a exigé une restructuration de la dette comme condition préalable à son soutien financier. Addis-Abeba n’avait donc d’autre choix que de renégocier avec ses créanciers pour éviter un défaut de paiement.

Le Cadre commun du G20 : une solution à quel prix ?

L’accord conclu s’inscrit dans le Common Framework, un mécanisme instauré par le G20 en 2020 pour aider les pays les plus endettés à restructurer leur dette de manière coordonnée. Avant l’Éthiopie, la Zambie et le Tchad avaient déjà bénéficié de ce dispositif.

L’intérêt de ce cadre est d’éviter des négociations éclatées et de garantir une approche équitable entre les créanciers. Il vise aussi à empêcher que certains prêteurs obtiennent des conditions plus favorables au détriment des autres. Toutefois, ce mécanisme a ses limites. Il repose uniquement sur la bonne volonté des créanciers, et les discussions peuvent s’éterniser, comme ce fut le cas pour la Zambie, dont le processus a duré plus de trois ans.

Quels impacts pour l’économie éthiopienne ?

À court terme, cette restructuration donne une bouffée d’oxygène aux finances publiques. La réduction du service de la dette de 2,5 milliards de dollars d’ici 2028 va libérer des fonds pour des secteurs prioritaires tels que les infrastructures, notamment les routes, l’électricité et les télécommunications. L’agriculture, qui emploie plus de 70% de la population, pourrait également en bénéficier, tout comme l’éducation et la santé, deux domaines souffrant d’un sous-financement chronique.

À plus long terme, cet accord pourrait aussi rassurer les investisseurs étrangers, qui redoutaient un risque de surendettement incontrôlé. Une meilleure gestion de la dette pourrait stabiliser la monnaie nationale et limiter l’inflation. Mais ce scénario optimiste dépend de plusieurs facteurs, notamment la capacité du gouvernement à mener des réformes économiques structurelles.

Des défis encore nombreux

Malgré cet allégement, la restructuration de la dette ne règle pas tout. L’accord ne concerne que les créanciers bilatéraux, laissant de côté les créanciers privés, qui détiennent encore une part importante de la dette éthiopienne.

De plus, Addis-Abeba doit impérativement diversifier son économie pour éviter de retomber dans un cercle vicieux d’endettement. Le pays dépend encore trop de l’agriculture et des exportations de café, et doit moderniser son secteur bancaire pour attirer plus d’investissements.

Enfin, la stabilité politique reste une variable clé. Les tensions internes et les conflits régionaux pourraient ralentir l’implémentation des réformes nécessaires pour une véritable relance économique.

Un soulagement temporaire, mais pas de solution miracle

L’accord de restructuration signé par l’Éthiopie marque une avancée importante en réduisant temporairement la pression sur les finances publiques. Il permet à Addis-Abeba de gagner du temps et de réorienter ses ressources vers des investissements stratégiques.

Mais ce n’est pas une solution miracle. Sans réformes économiques profondes et une gestion plus rigoureuse de sa dette, le pays pourrait se retrouver dans une situation similaire d’ici quelques années. Cette restructuration est donc un premier pas, mais la véritable relance de l’Éthiopie dépendra des choix économiques et politiques des années à venir.

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