Or stratégique : comment le Ghana renforce son bouclier financier face aux chocs mondiaux

0
84
En deux ans, la Banque du Ghana a triplé ses réserves d’or pour atteindre plus de 31 tonnes, renforçant sa stabilité monétaire et réduisant sa dépendance au dollar dans un contexte économique mondial incertain.
En deux ans, la Banque du Ghana a triplé ses réserves d’or pour atteindre plus de 31 tonnes, renforçant sa stabilité monétaire et réduisant sa dépendance au dollar dans un contexte économique mondial incertain.

Dans un contexte de tensions géopolitiques persistantes et de volatilité financière accrue, la Banque du Ghana a triplé ses réserves d’or entre mai 2023 et avril 2025, les faisant passer de 8,78 tonnes à plus de 31 tonnes. Un choix stratégique qui s’inscrit dans une politique de diversification des avoirs extérieurs, visant à réduire la dépendance au dollar américain et à stabiliser la monnaie nationale, le cedi.

Une stratégie de couverture contre les risques systémiques

Ce renforcement rapide des réserves s’inscrit dans le programme « Gold for Reserves », lancé par la Banque centrale en 2021. Ce dispositif vise à acquérir localement de l’or extrait sur le territoire national pour constituer des réserves, sans recourir aux devises étrangères. L’objectif affiché : bâtir un socle de sécurité financière face aux chocs mondiaux, tout en soutenant la valeur du cedi, régulièrement mis sous pression sur le marché des changes.

L’or, actif tangible et non corrélé aux marchés financiers traditionnels, retrouve en effet une place centrale dans les stratégies des banques centrales. En avril 2025, l’once s’échangeait à 46 086 GH₵, valorisant le stock national à environ 46,4 milliards de GH₵, soit plus d’un million d’onces (environ 1 008 837 onces, sur la base de 32 150,7 onces par tonne). Convertie au taux de change moyen de 1 USD ≈ 13,5 GH₵, cette réserve équivaut à près de 3,4 milliards de dollars.

Soutenir le cedi, rassurer les marchés

En augmentant ses avoirs en or, la Banque du Ghana accroît sa marge de manœuvre en matière de politique monétaire. Cette réserve lui permet de renforcer la crédibilité de sa monnaie, de mieux absorber les chocs externes – notamment ceux liés aux fluctuations du dollar – et de réduire sa dépendance aux emprunts en devises.

L’accumulation d’or agit également comme un signal adressé aux marchés financiers et aux agences de notation : celui d’une politique macroéconomique plus prudente, adossée à des actifs non dépréciables. Dans un environnement où les flux de capitaux sont sensibles à la stabilité, cette stratégie peut contribuer à rassurer les investisseurs étrangers.

Un atout structurel lié à la production nationale

Premier producteur d’or du continent africain, devant l’Afrique du Sud, le Ghana dispose d’un avantage comparatif clé : la possibilité de constituer ses réserves sans recourir massivement aux marchés internationaux. La banque centrale peut ainsi s’approvisionner localement auprès de sociétés minières opérant dans le pays, ce qui limite les sorties de devises et favorise une forme d’autosuffisance monétaire.

Cette capacité à mobiliser un actif stratégique à partir de ressources internes distingue le Ghana d’autres économies africaines, souvent contraintes d’utiliser leurs réserves en devises pour sécuriser leur politique monétaire. La Banque du Ghana bénéficie donc d’une situation unique sur le continent, renforcée par la solidité de sa production aurifère.

Une trajectoire à suivre pour d’autres pays ?

Le succès du programme « Gold for Reserves » suscite un intérêt croissant sur le continent, où plusieurs pays cherchent à réduire leur exposition aux monnaies étrangères dans un contexte de resserrement monétaire global. Si la Banque du Ghana ne s’est pas encore exprimée sur un éventuel objectif cible à moyen terme, la tendance haussière du cours de l’or et la montée de l’incertitude mondiale laissent penser que ce métal précieux restera un pilier de sa stratégie.

Reste à savoir si cette politique sera suffisante pour renforcer durablement la résilience de l’économie ghanéenne. Car au-delà de l’or, d’autres défis structurels – dette publique, dépendance aux matières premières, pression sur la balance des paiements – continueront de conditionner la stabilité macroéconomique du pays.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici