
Dans un contexte où l’accès au financement reste l’un des principaux freins au développement du secteur privé africain, une nouvelle initiative entend combler un vide critique. L’entreprise Creditinfo, spécialiste mondial de l’évaluation du risque, vient de lancer la plateforme Business Information Africa (BI Africa), un outil d’intelligence économique destiné à améliorer la visibilité, la transparence et la solvabilité des PME africaines sur les marchés internationaux.
Le projet sera d’abord déployé au Kenya à partir de juin 2025, avant une extension progressive à d’autres pays du continent. Un choix stratégique, dans la mesure où le Kenya dispose d’un écosystème fintech dynamique, souvent pionnier en matière d’innovation numérique appliquée à la finance.
Dans de nombreuses économies africaines, les petites et moyennes entreprises peinent à accéder au crédit formel. En cause : l’insuffisance de données fiables sur leur historique financier, leurs pratiques commerciales ou leur structure de gouvernance. Les banques, face à cette opacité, hésitent à accorder des prêts sans garanties solides. Cette asymétrie d’information freine l’investissement, l’exportation et la croissance.
C’est précisément à cette problématique que BI Africa veut répondre. En s’appuyant sur une base de données couvrant plus d’un million d’entreprises africaines, et connectée à un réseau de plus de 430 millions d’entités internationales, la plateforme propose des rapports standardisés comprenant des éléments-clés : historique juridique, données financières actualisées, structure de propriété ou encore solvabilité. L’objectif : offrir une information claire et comparable, en temps réel, à tous les acteurs économiques – investisseurs, partenaires commerciaux ou institutions de financement.
Ce service n’est pas réservé aux grandes entreprises ou aux multinationales. Creditinfo cible en priorité les entrepreneurs et les PME locales, souvent mal desservis par les circuits bancaires traditionnels. Grâce à une interface simplifiée et des fonctions de recherche manuelle accessibles, une entreprise kényane pourra par exemple évaluer en quelques secondes la fiabilité d’un fournisseur étranger ou d’un client local, un processus qui prenait auparavant plusieurs jours, voire des semaines.
Dans une Afrique en quête d’intégration plus poussée dans les chaînes de valeur mondiales, la capacité à produire des preuves tangibles de sa crédibilité financière devient un levier de compétitivité. L’accès à ce type de données structurées permet non seulement de rassurer les partenaires, mais aussi de professionnaliser les pratiques commerciales à l’échelle locale. En encourageant la transparence, BI Africa ambitionne de faire évoluer les normes de confiance dans les échanges économiques, en remplaçant les réseaux informels par des critères objectifs et vérifiables.
Au-delà de l’outil technologique, c’est une vision économique plus large que Creditinfo veut défendre : celle d’une croissance inclusive, bâtie sur l’élargissement de l’accès au crédit et la formalisation du tissu entrepreneurial. Cette approche rejoint les priorités exprimées par plusieurs gouvernements africains, soucieux de structurer leur secteur privé et d’attirer des investissements durables.
Mais le pari reste ambitieux. Le succès de la plateforme dépendra aussi de la capacité des acteurs publics et privés à s’en emparer, à intégrer ces données dans leurs décisions, et à soutenir les PME dans leur montée en compétence numérique. BI Africa pourrait ainsi devenir, à terme, un catalyseur discret mais déterminant du développement économique du continent.