Mines / Platine : la ruée chinoise qui réveille l’Afrique australe

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Mines / Platine : la ruée chinoise qui réveille l’Afrique australe
Mines / Platine : la ruée chinoise qui réveille l’Afrique australe

La Chine redessine les équilibres du marché du platine. En misant sur ce métal rare pour ses bijoux, ses investissements et ses véhicules hybrides, elle dope la demande mondiale. Une aubaine, mais aussi un test grandeur nature pour les deux géants africains du secteur : l’Afrique du Sud et le Zimbabwe.

Une demande chinoise en pleine expansion

Selon Heraeus Precious Metals, leader allemand du recyclage et de l’affinage de métaux précieux, la demande de platine en Chine reste « soutenue, notamment dans la bijouterie et l’investissement ». Bien que soumise à des contraintes fiscales, cette consommation est portée par un appétit croissant pour un métal jugé « sous-évalué » par rapport à l’or.

Mais c’est aussi la transition énergétique qui entre en jeu. La Chine, engagée dans le développement de véhicules hybrides et de l’économie de l’hydrogène, utilise de plus en plus de platine dans ses catalyseurs et électrolyseurs. Le pays investit également dans le recyclage de catalyseurs, un secteur en croissance de 18% par an, pour sécuriser son approvisionnement (Heraeus, 2024).

Afrique du Sud : entre opportunité et fragilité structurelle

Premier producteur mondial de platine avec plus de 70% de l’offre globale, l’Afrique du Sud est logiquement la première bénéficiaire de cette demande en hausse. Des géants comme Anglo American Platinum, Impala Platinum ou Sibanye-Stillwater voient leurs perspectives de revenus s’améliorer.

Mais le pays reste exposé à de nombreux risques. Les infrastructures électriques sont défaillantes, et les tensions sociales dans le secteur minier sont fréquentes. En 2022, une grève de cinq mois chez Sibanye-Stillwater a illustré les tensions persistantes entre syndicats et direction.

Les analystes rappellent également que la dépendance excessive à une seule ressource rend l’économie sud-africaine vulnérable. « Si la demande mondiale se retourne ou si la Chine réduit ses achats, l’impact serait considérable », souligne un rapport de PwC Mining in Africa.

Zimbabwe : des ambitions freinées par la gouvernance

Troisième producteur mondial, avec environ 19 000 kg de platine extraits par an, le Zimbabwe tente de profiter de la dynamique chinoise. Plusieurs joint-ventures, souvent avec des capitaux chinois, se développent dans le pays. Le projet Great Dyke Investments, soutenu par des investisseurs russes et chinois, est emblématique de cette stratégie.

Mais la gouvernance reste un obstacle. Corruption, insécurité juridique, instabilité fiscale : autant de facteurs qui dissuadent certains investisseurs. De plus, les retombées économiques pour la population restent faibles, selon Human Rights Watch, qui dénonce régulièrement les conditions de travail dans les mines.

Une redistribution mondiale à surveiller

La poussée de la Chine dans le platine pourrait, à terme, redessiner les flux mondiaux. En plus de recycler plus localement, Pékin pourrait chercher à sécuriser directement ses approvisionnements, voire à en contrôler les prix. Une stratégie déjà observée sur le marché du cobalt ou du lithium.

Tirer les leçons de l’or noir

Si l’Afrique australe veut éviter les erreurs du passé – comme l’a montré la malédiction du pétrole dans certains pays africains – elle devra investir dans une gestion transparente, équitable et durable de ses ressources en platine. Une montée des prix à court terme ne garantit ni développement à long terme, ni prospérité partagée.

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