Technologie : Le rapport TMT Predictions 2025 de Deloitte explore les opportunités de l’IA pour l’Afrique

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À l’heure où l’intelligence artificielle (IA) redessine les équilibres mondiaux, l’Afrique cherche sa place dans la nouvelle carte technologique. Le rapport TMT Predictions 2025 de Deloitte, présenté le 28 mai à Abidjan, met en lumière les opportunités et les fragilités du continent face à cette révolution.

C’est à Abidjan, que s’est tenue la 12e édition de la conférence annuelle TMT Predictions, organisée par Deloitte Afrique francophone. À cette occasion, Felicia Djibo, Partner Consulting Leader à Deloitte Côte d’Ivoire, a situé les enjeux : « Technologies, médias, télécommunications… Ces secteurs évoluent à une vitesse fulgurante. L’enjeu, pour l’Afrique, est de transformer ces mutations en leviers concrets pour nos économies et nos États. »

Dans un contexte d’accélération technologique sans précédent, Deloitte identifie trois chantiers majeurs pour le continent : l’IA générative et ses impacts, la transformation des industries créatives et sportives, et les mutations du secteur des télécommunications. Décryptage.

Felicia Djibo, Partner Consulting Leader à Deloitte Côte d’Ivoire

Médias et divertissement : vers des modèles plus agiles et accessibles

Alors que les plateformes de SVOD comme Netflix plafonnent en Occident, les modèles hybrides émergent en Afrique. Showmax, par exemple, agrège déjà des contenus de HBO, Warner Bros ou Universal sous une seule offre. Etser Kango, Assistant Manager Stratégie et Transformation Digitale chez Deloitte CI, souligne : « 31% des utilisateurs africains sont favorables à ces agrégateurs, qui permettent de réduire les coûts dans un contexte inflationniste. »

L’IA générative reste encore marginale dans la création de contenus : moins de 3% des budgets y seront consacrés d’ici 2025, selon Deloitte. Mais dans les opérations – traduction, contrats, postproduction – l’IA devient un véritable levier d’optimisation. Pour les médias ivoiriens, c’est une opportunité de rationaliser les coûts, même si les questions liées aux droits d’auteur et à la propriété intellectuelle persistent.

Sport : les infrastructures comme catalyseur économique

Les stades africains changent de vocation. Utilisés pour les compétitions, mais aussi pour les concerts et les foires, ces lieux deviennent des pôles économiques. Deloitte recense 300 nouveaux stades prévus dans le monde d’ici 2025.

La Côte d’Ivoire, avec les infrastructures de la CAN, en donne un exemple : diversification des usages, insertion dans les circuits touristiques et attractivité pour les investisseurs. Au Maroc, un projet pharaonique prévoit le plus grand stade du monde (115 000 places). L’IA y sera utilisée pour fluidifier la billetterie, optimiser la sécurité et personnaliser l’expérience spectateur.

Énergie : le talon d’Achille de l’IA africaine

Si l’IA fait rêver, elle reste énergivore. Aka Ornella, de l’équipe Advisory de Deloitte CI, avertit : « Les centres de données pourraient consommer 2% de l’électricité mondiale en 2025, soit l’équivalent de 100 millions de foyers. » L’Afrique, confrontée à des défis énergétiques chroniques, devra faire preuve d’ingéniosité.

Des initiatives existent. La centrale solaire de Boundiali (80 mégawatts) témoigne de l’ambition ivoirienne d’atteindre 45% d’énergies renouvelables d’ici 2030. Microsoft et G42, de leur côté, misent sur un centre de données géothermique en Afrique de l’Est. Mais selon l’enquête de Deloitte, 31% des entreprises citent encore le coût énergétique comme principal frein à l’adoption de l’IA.

Femmes et IA : une inclusion encore à construire

Le rapport pointe un écart de genre significatif dans l’usage de l’IA : 34% des femmes contre 43% des hommes. La méfiance est palpable : seules 18% des femmes africaines font confiance aux technologies d’IA, contre 31% des hommes. La sécurité des données est la première source d’inquiétude.

Pourtant, les femmes pilotent 85% des décisions de consommation. Former et inclure les femmes devient donc stratégique. L’UNESCO et le Centre d’IA au Maroc forment déjà 150 femmes africaines. Le programme « She is the code », présent à Abidjan, Cotonou et Ouagadougou, initie les jeunes filles au codage. Ces efforts doivent désormais s’intensifier avec l’appui des banques, assureurs et fonds d’investissement.

Smartphones et agents IA : la prochaine frontière numérique

Avec une prévision de croissance de 7,5% en 2025, le marché mondial du smartphone se réinvente autour de l’IA embarquée. Google et Vodafone lanceront des Pixel phones IA en Afrique du Sud, au Kenya et en Égypte.

Dans les entreprises, les agents IA autonomes (capables de gérer des tâches sans intervention humaine) séduisent : 25% d’entre elles prévoient d’en intégrer d’ici 2025. Réseaux sociaux, service client, automatisation RH… les usages se multiplient. Encore faut-il que les entreprises ivoiriennes disposent des ressources pour investir dans ces outils.

Cybersécurité : l’autre face de l’IA

L’IA ne crée pas que des solutions, elle génère aussi de nouvelles menaces. Les deepfakes, vidéos truquées par IA, fragilisent la confiance numérique. « 50% des consommateurs se disent sceptiques face aux contenus en ligne », affirme Romaric Doffou, de Deloitte CI. En Côte d’Ivoire, le phénomène prend de l’ampleur en période électorale.

Si l’IA permet de mieux détecter les tentatives de fraude, elle est aussi utilisée pour les rendre plus sophistiquées. Vol d’identité (36%), escroquerie (31%), phishing (29%) : les entreprises africaines doivent se préparer. Le marché des cyber-assurances est en forte croissance. La FinOps (gestion des coûts cloud) devient aussi incontournable : elle pourrait permettre aux entreprises de réduire leurs dépenses cloud de 40%.

L’Afrique, entre promesses numériques et devoir de résilience

L’Afrique n’est plus spectatrice de la révolution numérique. L’édition 2025 du rapport TMT Predictions rappelle que les technologies – IA, cloud, cybersécurité – sont des outils à fort potentiel de transformation. Mais leur adoption exige une vision claire, des politiques d’inclusion, une gouvernance de la donnée, et surtout un accompagnement énergétique et financier.

Felicia Djibo le résume ainsi : « Ce rendez-vous est le vôtre. À nous d’en faire un catalyseur d’innovation au service d’un développement durable et inclusif. »

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