Mines / Togo : Nayega à l’assaut du marché mondial du manganèse

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Le Togo s’apprête à franchir un cap stratégique dans le secteur extractif. Dans les prochains jours, la mine de manganèse de Nayega, située dans la région des Savanes, entamera officiellement sa phase de production. Porté par la Société Togolaise de Manganèse (STM) et la firme britannique Keras Resources, le projet pourrait redessiner les contours de l’économie togolaise. Mais son poids réel sur l’échiquier mondial reste à relativiser.

Le manganèse, élément crucial dans la fabrication de l’acier et des batteries pour véhicules électriques, connaît une demande croissante portée par la transition énergétique et les tensions géopolitiques. Dans ce contexte, le lancement de Nayega s’inscrit dans une volonté affichée du gouvernement togolais de diversifier ses ressources et de capter une part du marché mondial. Keras Resources évalue les réserves du site à 8,5 millions de tonnes et prévoit une production initiale de 4 000 tonnes par mois, avec un objectif à moyen terme de 8 000 tonnes.

À l’échelle mondiale cependant, le Togo reste un nouvel entrant modeste. Des géants comme l’Afrique du Sud et le Gabon dominent la production, avec respectivement plus de 5 millions et 3 millions de tonnes extraites annuellement. Dans ce paysage, Nayega devra miser sur ses atouts : des coûts d’exploitation potentiellement compétitifs, une logistique simplifiée grâce à la proximité du port de Lomé, et une gestion rigoureuse des opérations. La durée d’exploitation estimée à 11 ans impose par ailleurs une planification stratégique pour maximiser les retombées économiques sur une période relativement courte.

Pour le gouvernement togolais, qui détient la majorité du capital via la STM, ce projet revêt une dimension politique et sociale. Il s’agit à la fois de renforcer les recettes publiques et de stimuler le développement local dans une région longtemps marginalisée. Selon les autorités, environ 200 emplois directs et 500 indirects devraient être créés. Le ministre de l’Économie et des Finances, Sani Yaya, y voit une opportunité de “diversification économique et d’inclusion territoriale”.

Reste un point sensible : l’environnement. L’exploitation minière, notamment du manganèse, peut entraîner une pollution des sols et des nappes phréatiques. Keras affirme avoir mis en place des mesures de réduction d’impact, sans en détailler pour l’instant le contenu. Les populations riveraines, elles, attendent des garanties concrètes : construction d’écoles, accès à l’eau, infrastructures de santé. Le gouvernement a évoqué la création d’un fonds de développement local, dont les modalités de financement et de gouvernance restent à préciser.

Sur le plan international, Nayega entre en activité dans un contexte favorable. La Chine, principal consommateur mondial de manganèse, multiplie les stratégies de sécurisation de ses approvisionnements, tandis que l’Europe cherche à diversifier ses sources dans un climat de tensions commerciales. Les premiers contrats d’exportation sont en cours de négociation et viseraient les marchés asiatique et européen.

Le projet Nayega constitue donc une avancée notable pour le Togo, qui s’inscrit progressivement dans la carte minière africaine. Toutefois, l’enjeu ne sera pas seulement de produire, mais de transformer cette ressource en un levier durable de développement. Entre promesses économiques, attentes sociales et impératifs environnementaux, l’État togolais devra faire preuve d’une gouvernance exemplaire pour que cette mine ne reste pas un simple pari sur le sous-sol.

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