Derrière les annonces du Fonds monétaire international (FMI), ce sont les chiffres qui parlent le plus clairement. Le tableau des indicateurs macroéconomiques publié à l’issue de la quatrième revue du programme de Facilité élargie de crédit (FEC) montre un Ghana sur la voie du redressement, mais encore confronté à de nombreuses vulnérabilités.
Une croissance qui tient bon, portée par les secteurs productifs
Le Produit intérieur brut (PIB) réel a progressé de 5,7% en 2024, après une croissance modeste de 3,1% en 2023. Pour 2025, le FMI prévoit une légère décélération à 4%, mais toujours au-dessus de la moyenne des années post-Covid. Le PIB par habitant, indicateur clé du niveau de vie, a progressé de 3,7% en 2024 et devrait continuer à croître de 2,1% en 2025.
Le dynamisme est particulièrement visible dans le secteur extractif, avec une envolée de 9,4% en 2024, principalement grâce à l’or. Le secteur non-extractif (agriculture, industrie, TIC) est également solide, avec 5,1% de croissance.
Inflation en baisse mais encore hors des clous
L’un des signaux les plus scrutés est l’inflation. Après avoir culminé au-dessus de 50% en 2022, l’indice des prix à la consommation a ralenti à 23,8% fin 2024, et devrait tomber à 12% fin 2025, selon les projections. Le FMI souligne néanmoins que cette décrue reste insuffisante : la cible officielle de la Banque centrale se situe autour de 8%. La politique monétaire restera donc restrictive, comme l’indique le maintien d’un taux directeur élevé (27% fin 2024).
Discipline budgétaire retrouvée
Le solde budgétaire primaire – c’est-à-dire le solde avant paiement des intérêts de la dette – est l’un des indicateurs phares du FMI. Négatif de –3,3% du PIB en 2024, il devrait passer en excédent de +1,5% en 2025. Cela marque une nette amélioration dans la discipline budgétaire, après les dérapages constatés en fin d’année électorale.
Le niveau de recettes publiques, encore faible à 15,9% du PIB, devrait progresser légèrement dans les années à venir. L’objectif est d’atteindre 17% du PIB en 2030, ce qui reste bas comparé à la moyenne des pays émergents (souvent au-delà de 20%).
Trajectoire descendante de la dette
La dette publique brute était de 79,1% du PIB en 2023, un niveau critique. Grâce aux mesures d’ajustement budgétaire et à la restructuration en cours, elle devrait reculer à 66% en 2025, et à 51,9% d’ici 2030. Une trajectoire jugée soutenable par le FMI, à condition de maintenir le cap.
Les projections montrent aussi une baisse progressive de la dette intérieure (de 37,1% en 2023 à 23,6% en 2030), tandis que la dette extérieure reste stable autour de 28–36% du PIB.
Amélioration du compte courant et des réserves
Autre signe positif : le solde du compte courant, souvent déficitaire, est passé en territoire positif depuis 2024 (+1,1% du PIB), et devrait rester excédentaire jusqu’en 2027. Cela reflète la vigueur des exportations, notamment minières, et les transferts des migrants.
Les réserves de change, quant à elles, ont plus que doublé : de 3,6 milliards de dollars en 2023 à 6,4 milliards en 2024, avec une projection à 8,4 milliards pour 2025. Elles couvrent désormais 3,3 mois d’importations, contre seulement 1,5 mois deux ans plus tôt — un seuil jugé rassurant par les bailleurs.
Le crédit au secteur privé repart, mais timidement
Le crédit bancaire au secteur privé a progressé de 26,3% en 2024, selon le tableau du FMI. Cette hausse s’inscrit dans un contexte de stabilisation du système bancaire. Toutefois, le niveau de taux d’intérêt (souvent supérieur à 30%) continue de peser sur les investissements productifs.
Des perspectives solides, mais conditionnées
À horizon 2027–2030, le FMI table sur une croissance stable autour de 5%, une inflation maîtrisée autour de 8%, et un niveau de dette en net repli. Mais cette trajectoire optimiste repose sur plusieurs hypothèses fortes : maintien des excédents primaires, amélioration de la collecte fiscale, poursuite des réformes structurelles, et absence de nouveaux chocs externes (comme une chute des cours de l’or ou une crise énergétique).
Les chiffres du FMI montrent un Ghana sur une trajectoire de stabilisation et de reprise. Mais ce redressement reste encore fragile, dépendant d’un effort budgétaire constant, de la maîtrise de l’inflation et d’un engagement ferme à réformer. Pour les autorités, l’enjeu est désormais de transformer la reprise macroéconomique en croissance inclusive et durable.