Environ 65% des banques opérant en Afrique subsaharienne considèrent les risques liés à la cybersécurité comme un frein majeur à l’accélération de leur transformation numérique, selon un rapport publié le 7 novembre par la Banque européenne d’investissement (BEI).
Intitulé « La finance en Afrique : Débloquer l’investissement à l’ère de la transformation numérique et de la transition climatique », le rapport se base essentiellement sur une enquête menée auprès de 51 banques opérant au sud du Sahara entre février et mars 2024.
Les craintes en matière de cybersécurité que suscite l’intégration des technologies digitales dans l’ensemble des activités bancaires sont également perçues comme un frein modéré ou mineur à la poursuite de la transformation numérique par 31% des établissements interrogés.
Les autres facteurs majeurs qui freinent une digitalisation accrue des opérations bancaires sont notamment le manque de savoir-faire et les connaissances limitées en informatique (36%), la concurrence des entreprises de télécommunications et de technologies financières (35%), les exigences relatives à la connaissance des clients (29%) et les exigences réglementaires inexistantes, imprécises ou incertaines (23%).
Malgré ses freins, près de neuf banques actives en Afrique subsaharienne sur dix investissent dans des formations spécialisées pour améliorer les compétences numériques de leur personnel, dans un contexte marqué par une forte compétition avec les start-up de technologies financières (fintechs) et les opérateurs télécoms qui s’aventurent de plus en plus dans le domaine des services financiers.
La prestation de services numériques constitue aujourd’hui une offre essentielle des banques traditionnelles dans la région. Les trois services numériques les plus courants sont les transferts de fonds à l’échelle nationale (90%), la réception de paiements de la part de clients (80 %) et le paiement des factures ou des fournisseurs (75%).
Parmi les banques couvertes par l’enquête, la moitié propose d’autres opérations bancaires via des canaux numériques tels que le transfert de fonds à l’échelle internationale ou l’ouverture d’un compte bancaire à distance, tandis qu’un tiers envisage l’introduction de ces services.
Toutefois, si les banques sont de plus en plus concurrencées par les fintechs, les partenariats entre les unes et les autres sont également fréquents. Les banques sont fortement incitées à s’associer à des entreprises de technologies financières, notamment pour améliorer l’expérience client (100% des banques sondées), accéder à des technologies innovantes (95 %), élargir leur clientèle (91%) et réaliser des économies de coûts (87%).
L’environnement économique arrive en tête des préoccupations
Le rapport indique dans ce cadre que le secteur des technologies financières a enregistré une croissance modérée ces deux dernières années, après une expansion rapide entre 2020 et 2022. En janvier 2024, on recensait plus de 1263 fintechs en Afrique, contre 1049 en avril 2022 et 450 en 2020. Les services de paiement et de prêt restent les produits financiers prépondérants proposés par les fintechs. 33 % des entreprises du secteur offrent des solutions de paiement et 19 % des produits de prêt. Les fintechs restent cependant fortement concentrées dans les plus grandes économies d’Afrique. Le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Egypte accueillent environ 70 % du total de ces start-up qui révolutionnent le monde de la finance en Afrique, et attirent environ 80 % des financements orientés vers ce secteur.
Sur un autre plan, le rapport révèle que l’environnement économique arrive en tête des préoccupations citées par les banques d’Afrique subsaharienne (77%), devant la qualité des actifs (53%) et les difficultés à trouver des financements (33%).
D’autre part, les banques interrogées ont fait état d’une plus grande activité avec les petites et moyennes entreprises (PME) qu’avec les grandes entreprises. 94% des banques ont accordé des prêts directs à des PME au cours des 12 derniers mois, tandis que 6 % ont prêté à des grandes entreprises. Celles-ci bénéficient cependant de délais de remboursement plus longs pour les prêts. 59% des prêts aux PME, contre 34% des prêts aux grandes entreprises, ont une durée de remboursement de deux ans ou moins.
Les obstacles liés à l’accès au crédit bancaire sont aussi plus contraignants pour les petites entreprises que pour les grandes. Les principaux obstacles à l’obtention de prêts par les PME sont le manque de garanties acceptables et les mauvais antécédents de crédit, que 65% et 51% des banques considèrent, respectivement, comme des obstacles majeurs. Dans le cas des prêts aux grandes entreprises, ces deux facteurs ne sont en revanche perçus comme des obstacles majeurs que par 34% et 16% des banques, respectivement.
Par ailleurs, les banques actives en Afrique subsaharienne signalent des conséquences non négligeables du risque climatique physique sur leurs activités, en particulier en ce qui concerne le portefeuille des PME. Environ un tiers des banques (34%) ont fait état d’une baisse de la qualité des actifs en raison du changement climatique, la grande majorité des banques (93%) indiquant que les microentreprises et les PME sont les emprunteurs les plus touchés. Pour la majorité des banques (59%), le climat n’a pas eu d’incidence significative sur la qualité des actifs. Ce résultat, qui peut sembler surprenant, s’explique par le fait que dans de nombreux pays, les banques ont généralement une faible exposition aux secteurs sensibles au dérèglement climatique, notamment l’agriculture.
Source : Agence ecofin