Financer l’Afrique par l’Afrique : un tournant décisif pour les infrastructures en 2025

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Financer l’Afrique par l’Afrique : un tournant décisif pour les infrastructures en 2025
Financer l’Afrique par l’Afrique : un tournant décisif pour les infrastructures en 2025

L’Afrique a les milliards, mais pas encore les mécanismes. Un rapport de l’AFC révèle que le continent peut financer son propre développement. Encore faut-il savoir mobiliser et investir ses propres capitaux.

Face à un contexte mondial incertain et à une raréfaction des financements extérieurs, l’Afrique explore une piste longtemps négligée : celle de ses propres ressources. Le rapport State of Africa’s Infrastructure Report 2025, publié par l’Africa Finance Corporation (AFC), met en lumière un potentiel financier interne considérable, encore largement sous-utilisé. Au-delà du constat, il propose un changement de paradigme : faire des capitaux africains le levier principal du développement du continent.

Des milliards disponibles, mais mal orientés

Contrairement à l’image d’un continent dépendant de l’aide internationale, l’Afrique détient en réalité une épargne colossale. Le rapport de l’AFC estime les capitaux domestiques à plus de 4 000 milliards de dollars, répartis entre les fonds de pension (455 milliards), les compagnies d’assurance (320 milliards) et les fonds souverains (150 milliards). Un volume suffisant pour financer une part significative des besoins en infrastructures.

Mais cette manne financière reste essentiellement placée dans des actifs à faible rendement et à court terme, souvent à l’étranger. Le rapport pointe un déficit d’intermédiation : les capitaux existent, mais ils ne sont pas canalisés vers les projets structurants du continent. Le problème ne tient donc pas à la rareté des fonds, mais à leur mauvaise affectation.

S’inspirer de l’Asie pour mobiliser l’épargne locale

À cet égard, l’Afrique pourrait tirer des enseignements des trajectoires de développement en Asie de l’Est et du Sud-Est. Ces régions ont su transformer des taux d’épargne élevés en investissements productifs en renforçant leurs systèmes financiers et en développant leurs marchés de capitaux. Résultat : des ressources domestiques orientées vers l’infrastructure, l’industrie et l’innovation.

Le rapport de l’AFC insiste sur la nécessité pour l’Afrique de suivre cette voie, en consolidant ses institutions financières, en facilitant la bancarisation, et en créant des instruments adaptés à l’investissement long terme. Ce chantier est essentiel pour que les flux financiers africains alimentent la croissance continentale, et non les économies développées.

L’infrastructure, pilier de la souveraineté économique

Dans cette perspective, l’investissement dans les infrastructures n’est pas un simple besoin technique ; il devient un enjeu stratégique. Selon l’AFC, les infrastructures sont désormais au cœur de la résilience, de la compétitivité et de la souveraineté économique des pays africains. Leur développement conditionne la capacité du continent à industrialiser, à échanger, à produire localement et à intégrer ses économies.

Transport, énergie, industrie : les défis sectoriels

Dans le secteur des transports, des signaux encourageants émergent. Les ports africains, par exemple, attirent des investissements significatifs, visant à améliorer leur efficacité et à renforcer leur connexion avec les réseaux intérieurs. Le développement ferroviaire, longtemps en sommeil, se redynamise grâce à de nouveaux modèles de financement. Toutefois, les routes, infrastructure essentielle pour les zones enclavées, continuent de souffrir d’un retard structurel. L’AFC appelle à des réformes de gouvernance et à des partenariats public-privé mieux encadrés pour stimuler leur développement.

L’énergie constitue un autre maillon critique. Malgré des efforts, la production électrique reste insuffisante, éclatée, et inadaptée à la croissance démographique et industrielle. L’AFC plaide pour un changement de modèle de financement du secteur, estimant qu’un accès significatif commence à partir de 1 000 kWh par habitant et par an. L’intégration énergétique régionale, via les interconnexions, est également jugée indispensable pour optimiser les coûts et accélérer l’intégration des énergies renouvelables.

Du côté de l’industrie, des opportunités importantes se dessinent, notamment dans l’acier et les engrais. Le rapport souligne que l’Afrique peut localiser davantage la création de valeur dans ces filières, notamment en capitalisant sur ses réserves de ressources naturelles. Cette industrialisation est également vue comme un levier majeur pour renforcer la sécurité alimentaire, notamment à travers le soutien à une agriculture résiliente face aux aléas climatiques.

Transformation numérique : entre avancées et fractures

La dynamique numérique offre des perspectives nouvelles. Le rapport relève une accélération notable de la transformation digitale sur le continent. Néanmoins, les disparités d’accès restent profondes. La connectivité en milieu rural demeure limitée, le coût de la donnée est encore trop élevé, et la qualité du haut débit souvent insuffisante. Réduire cette fracture numérique est une condition sine qua non pour assurer une inclusion technologique à l’échelle du continent.

Construire un écosystème intégré pour transformer l’essai

Le rapport ne se contente pas de dresser un état des lieux. Il appelle à une mobilisation politique et économique ambitieuse. Pour concrétiser le potentiel identifié, l’AFC préconise une intégration régionale renforcée, le développement de partenariats public-privé plus structurés et la mise en place d’écosystèmes d’infrastructures capables d’alimenter les chaînes de valeur industrielles.

Car si l’Afrique a, sur le papier, les ressources nécessaires à son développement, la réussite de cette transformation dépendra de la capacité des États à impulser un changement systémique. Le moment est venu, souligne le rapport, d’unir volonté politique, coordination régionale et instruments financiers adaptés pour convertir le potentiel en impact réel. Le pari est audacieux, mais les fondations sont déjà là.

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