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  • 20/08/2025

Afrique : Le paiement instantané s’impose, l’inclusion reste le grand défi

Acheter un produit en quelques secondes grâce à son téléphone portable : pour des millions d’Africains, ce scénario est déjà une réalité. En 2024, le continent comptait déjà 31 systèmes de paiement instantané (IPS) opérationnels dans 26 pays, selon le rapport State of Inclusive Instant Payment Systems (SIIPS) publié par AfricaNenda, la Banque mondiale et la CEA. Et la dynamique s’accélère : 27 autres projets sont en cours.

 

Une croissance impressionnante

 

En cinq ans, le volume des transactions instantanées a progressé de 37%, et leur valeur de 39%. Des chiffres qui traduisent l’essor du numérique dans les services financiers africains (AfricaNenda, 2024). Les IPS s’imposent peu à peu comme une infrastructure clé pour faciliter les échanges et réduire la dépendance au cash.

 

Une inclusivité encore limitée

 

Cette montée en puissance ne signifie pas pour autant que tous les citoyens en bénéficient. Le rapport insiste sur une limite majeure : les IPS africains ne sont pas encore véritablement inclusifs. La plupart privilégient les transferts de personne à personne (P2P), au détriment d’autres cas d’usage comme le paiement des commerçants (P2B), le règlement des factures ou les transactions avec l’État.

 

Comme le souligne AfricaNenda :

« Un système de paiement instantané inclusif doit répondre aux besoins des populations marginalisées. Il doit être abordable, accessible sur différents canaux et proposer plusieurs cas d’usage » (SIIPS 2024).

 

Trois leviers pour élargir l’accès

 

Le rapport met en avant trois conditions essentielles pour rendre les paiements instantanés plus inclusifs :

Orientation consommateur : développer des canaux simples comme l’USSD ou les QR codes pour toucher les utilisateurs de téléphones basiques.

Gouvernance ouverte : associer davantage les fintechs et prestataires de services de paiement, au-delà des banques traditionnelles, tout en maintenant le rôle de supervision des banques centrales.

Mécanismes de recours : instaurer des dispositifs fiables de contestation en cas d’erreur ou de fraude afin de renforcer la confiance.

 

Des obstacles persistants

 

Malgré les avancées, les limites structurelles demeurent fortes. La sécurité des transactions et la fiabilité des réseaux posent encore problème. La fraude alimente une méfiance persistante, notamment chez les femmes, qui restent plus hésitantes à adopter ces outils (AfricaNenda, 2024).

 

Le rôle clé des infrastructures numériques publiques

 

Le rapport insiste sur l’importance des Digital Public Infrastructures (DPI) pour franchir un cap. L’identification électronique (eKYC), l’interopérabilité réglementaire ou encore l’octroi de licences fintech apparaissent comme des leviers majeurs pour démocratiser l’accès aux paiements numériques.

 

Un potentiel encore sous-exploité

 

La trajectoire est claire : l’Afrique est entrée dans l’ère du paiement instantané. Mais l’enjeu dépasse désormais la simple multiplication des systèmes. Il s’agit de bâtir des mécanismes inclusifs, fiables et adaptés aux réalités locales.

 

Lors du lancement du rapport, Robert Ochola, directeur général d’AfricaNenda, rappelait :

« L’avenir des paiements numériques en Afrique ne se mesure pas au nombre de transactions, mais à la capacité de ces systèmes à toucher chaque citoyen, du centre urbain à la zone rurale » (SIIPS 2024).

 

En résumé : l’Afrique avance vite sur le paiement instantané. Mais pour qu’il devienne un levier de développement et d’inclusion financière, il faudra dépasser le cap technologique pour investir dans la confiance, l’accessibilité et l’équité d’accès.