0,3% d’inflation en juin 2025. Ce chiffre, annoncé par la Banque de Réserve du Zimbabwe (RBZ), symbolise un changement d’époque pour une économie traumatisée par des années d’instabilité monétaire. Depuis l’introduction du ZiG en avril 2024, la Banque centrale cherche à démontrer que le Zimbabwe peut à nouveau disposer d’une monnaie nationale crédible et fonctionnelle. Un an plus tard, les premiers résultats donnent des signes de consolidation, sans effacer totalement les incertitudes.
Le ZiG, acronyme de Zimbabwe Gold, est la nouvelle monnaie nationale qui remplace le dollar zimbabwéen (ZWL), abandonné en raison de son hyperinflation chronique. Contrairement à ses prédécesseurs, le ZiG repose sur un mécanisme de confiance inédit pour le pays : il est adossé à un panier d’actifs tangibles, principalement de l’or physique et des réserves en devises. Cette ancre vise à garantir la valeur de la monnaie, éviter les dérapages inflationnistes, et restaurer une souveraineté monétaire que le Zimbabwe avait largement perdue avec la dollarisation informelle de son économie.
Dès sa mise en circulation, la RBZ a misé sur une politique monétaire stricte. Les autorités ont limité l’émission de billets, surveillé la masse monétaire en circulation et mis en place un système de change encadré, dit « Willing-Buyer Willing-Seller », où les devises s’échangent selon l’offre et la demande, sous la supervision de la Banque centrale. Ce cadre permet de réduire les manipulations de taux et d’assurer un minimum de transparence.
Le rapport du deuxième trimestre 2025 montre que ces choix commencent à porter leurs fruits. L’inflation mensuelle, qui atteignait encore 0,9% en mai, a été réduite à 0,3% en juin. Sur les cinq derniers mois, l’inflation moyenne est restée stable autour de 0,5%. Même si la RBZ prévoit encore une inflation cumulée de 30% sur l’année, elle insiste sur le caractère contrôlé et prévisible de cette dynamique, en rupture avec les années d’effondrement monétaire.
Au cœur de cette stratégie figure le renforcement des réserves. Entre le premier et le deuxième trimestre 2025, les réserves de change sont passées de 630 millions à 731 millions de dollars. Dans le même temps, les réserves d’or ont doublé, atteignant 3,4 tonnes en juin contre 1,5 tonne en avril. Cette accumulation permet désormais à la RBZ de garantir une couverture totale des dépôts bancaires en ZiG. Autrement dit, pour chaque unité de ZiG déposée dans le système, une contrepartie réelle existe sous forme de réserves. C’est un filet de sécurité essentiel pour ancrer les anticipations et éviter les paniques bancaires.
La stabilité du ZiG est aussi soutenue par des flux de devises en forte hausse. Entre janvier et mai 2025, le pays a reçu 6,0 milliards de dollars américains en devises étrangères, contre 4,9 milliards sur la même période un an plus tôt. Ce surcroît de liquidités provient notamment d’exportations minières dynamiques et d’une amélioration progressive du climat des affaires. Grâce à ces recettes, la Banque centrale peut répondre aux besoins en devises des opérateurs économiques, sécuriser les importations vitales et maintenir une certaine fluidité sur le marché des changes.
En parallèle, la RBZ a introduit une Facilité de Financement Ciblé (TFF) en février 2025, destinée à diriger les crédits vers les secteurs les plus stratégiques de l’économie. Les chiffres indiquent que près de 49% des fonds ont été alloués à l’industrie manufacturière et près de 35% à l’agriculture. L’objectif est de renforcer la production nationale, de réduire la dépendance aux importations et de soutenir la valeur intrinsèque de la monnaie à travers l’activité réelle.
Derrière ces efforts techniques se cache une question fondamentale : le citoyen zimbabwéen ressent-il une amélioration concrète ? Pour l’instant, le retour de la stabilité monétaire semble offrir un répit aux ménages, durement éprouvés par des années de fluctuations de prix et de perte de pouvoir d’achat. Une inflation basse signifie que les salaires sont moins érodés, les prix plus prévisibles, et les transactions moins risquées. De plus, le bon fonctionnement du système de change favorise la confiance dans les paiements en monnaie locale, réduisant partiellement la dépendance au dollar américain.
Mais rien n’est encore gagné. Une inflation annuelle de 30%, même maîtrisée, reste élevée. La confiance reste fragile dans un pays où la mémoire des dévaluations massives est encore vive. Les réserves, bien qu’en hausse, demeurent modestes à l’échelle d’une économie nationale. La crédibilité du ZiG dépendra donc de la continuité de la discipline budgétaire et monétaire, ainsi que de la transparence des autorités sur la gestion des réserves et des mécanismes de soutien de la monnaie. En somme, le ZiG marque une tentative sérieuse de stabilisation monétaire dans un pays longtemps frappé par l’instabilité. Pour la première fois depuis plus d’une décennie, le Zimbabwe semble avancer vers une forme de normalité économique. Mais cette normalité reste suspendue à une condition centrale : que la confiance, une fois retrouvée, ne soit pas à nouveau trahie.