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  • 06/11/2025

Banque centrale du Ghana / Cryptos : Vers une régulation intelligente des actifs virtuels

Le Ghana franchit un cap décisif dans la régulation des actifs virtuels. Dans un document publié le mercredi 5 novembre 2025, la Bank of Ghana (BoG) dévoile sa position officielle sur les actifs virtuels et les prestataires de services associés (VASPs). Une démarche attendue, dans un pays où plus de 3 millions d’usagers échangent, investissent ou transfèrent des cryptomonnaies.

 

Un secteur en pleine effervescence, mais encore flou

 

Depuis la publication du livre blanc du Bitcoin en 2008, le Ghana a vu émerger une multitude d’acteurs : plateformes d’échange, portefeuilles numériques, services de garde et de conseil. En juillet 2025, plus de 100 VASPs ont été enregistrés, révélant l’ampleur d’un écosystème en croissance rapide.

 

Mais cette expansion s’est faite sans cadre juridique dédié, exposant les utilisateurs à des risques majeurs : fraude, blanchiment d’argent, financement du terrorisme, et instabilité financière. Le rapport national AML/CFT/CPF 2024 a tiré la sonnette d’alarme, soulignant la vulnérabilité du secteur.

 

Une régulation ni hostile, ni permissive

 

Le Ghana rejette l’idée d’une interdiction pure et simple. Une telle mesure « pousserait les activités dans l’informel, hors de portée des régulateurs », rappelle le document, en écho aux recommandations du Financial Action Task Force (FATF).

 

À la place, le pays opte pour une régulation fondée sur les risques, visant à concilier innovation technologique et protection du système financier. L’objectif : encadrer sans étouffer.

 

Six principes pour un encadrement efficace

 

Le document énonce six principes directeurs :

  • Réguler les VASPs selon leurs activités, pas leur technologie.
  • Maintenir une approche neutre, ni pro-crypto, ni anti-crypto.
  • Adapter les exigences aux risques : plus de contrôle pour les services à haut risque.
  • Coordonner les régulateurs : BoG, SEC, FIC, CSA, DPC.
  • Surveiller les évolutions internationales (FATF, IMF, IOSCO…).
  • Renforcer la littératie financière, notamment chez les jeunes.

 

Vers un cadre juridique structuré

 

La future régulation reposera sur trois piliers :

  • Principe-based : des lois générales, complétées par des directives spécifiques.
  • Activity-based : régulation selon les fonctions (paiement, garde, échange…).
  • Risk-based : exigences modulées selon le niveau de risque.

 

Ce modèle permettra de réduire les amendements législatifs fréquents, tout en restant agile face aux innovations.

 

Huit recommandations concrètes

 

Parmi les mesures proposées :

1.   Licencier les VASPs auprès de la BoG ou de la SEC.

2.   Aligner le cadre sur la loi anti-blanchiment (Act 1044) et les standards internationaux.

3.   Appliquer la Travel Rule du FATF : traçabilité des transactions.

4.   Clarifier les rôles de supervision entre les institutions.

5.   Mettre en place une surveillance continue du secteur.

6.   Maintenir que les cryptos ne sont pas une monnaie légale.

7.   Créer un Bureau de régulation des actifs virtuels (VARO).

8.   Lancer une Initiative nationale de littératie (NaVALI).

 

Une régulation africaine en construction

 

Le Ghana rejoint ainsi des pays africains comme le Nigeria, le Kenya ou l’Afrique du Sud, qui cherchent à encadrer les cryptomonnaies sans freiner l’innovation. Selon le FMI, « une régulation bien conçue peut favoriser l’inclusion financière tout en réduisant les risques ».

 

Le défi est immense, mais le Ghana semble prêt à le relever. En misant sur la transparence, la collaboration et l’éducation, le pays pourrait devenir un modèle de régulation intelligente sur le continent.