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  • 18/11/2025

Barrick Mining : Le géant canadien prépare un divorce historique avec l’Afrique

Barrick Mining, longtemps considérée comme l’une des majors les plus enracinées dans le paysage minier africain, travaille désormais à un scénario qui aurait été impensable il y a encore trois ans : la liquidation pure et simple de ses actifs africains. Selon des sources proches du dossier, cette stratégie n’est plus un simple sujet de réflexion interne — c’est l’option qui prend le plus d’élan dans les discussions du conseil.

 

L’objectif est limpide : réduire brutalement l’exposition au risque politique et repositionner Barrick comme un acteur nord-américain pur, recentré sur des actifs considérés comme premium par les investisseurs.

 

Un retrait précipité par une conjonction de crises africaines

 

Officiellement, la direction répète qu’elle « ne commente pas les spéculations ». Officieusement, la situation au Mali a fait voler en éclats tout l’édifice construit depuis la fusion avec Randgold en 2019.

 

Loulo-Gounkoto, jadis la mine la plus rentable du groupe, est devenu un cas d’école de ce que redoute désormais le board :

  • saisie de trois tonnes d’or,
  • mise sous tutelle administrative,
  • dépréciation d’un milliard de dollars,
  • quatre employés encore détenus.

 

Dans les cercles financiers, on explique sans détour que le Mali a fait basculer Barrick dans une logique de gestion de crise permanente, incompatible avec les exigences de valorisation des grands fonds nord-américains.

 

Cette fracture malienne a agi comme un accélérateur. Depuis, toute la présence africaine de Barrick est réévaluée : RDC, Tanzanie, Côte d’Ivoire — où Tongon est déjà en cours de cession. Le groupe cherche désormais un atterrissage propre, régler les contentieux puis fermer le chapitre africain.

 

Une recomposition stratégique qui enterre l’ère Bristow

 

La vente des actifs africains viendrait déconstruire méthodiquement le legs de Mark Bristow, l’architecte de l’expansion africaine de Barrick.
En 2019, la fusion Barrick–Randgold avait été pensée comme un pari assumé sur les « frontier markets ».

 

Aujourd’hui, c’est précisément ce pari que le board s’apprête à annuler.
La nouvelle doctrine est claire :

  • Amérique du Nord = cœur stratégique
  • Afrique = actif à risque devenu incompatible avec la valorisation recherchée

 

Fourmile, au Nevada, cristallise cette bascule. Une mine encore à l’état d’essai, aucune production avant 2029, mais déjà courtisée comme le futur moteur de valorisation. Les analystes de Jefferies et d’autres ont revu leurs recommandations après les signaux envoyés par la direction : Barrick veut redevenir une maison nord-américaine, lisible, prévisible, attractive.

 

Pourquoi la sortie d’Afrique séduit les investisseurs

 

Depuis cinq ans, Barrick sous-performe face à ses pairs.

  • Barrick : +52%
  • Agnico Eagle : +142%

 

Et pourtant, ironie des marchés, le cours de Barrick a bondi de 130% cette année. Les fonds activistes y voient un momentum idéal pour restructurer en profondeur.

 

Dans les salles de marché, l’équation est racontée sans détour :

  • Le Nevada vaut de l’or.
  • L’Afrique coûte trop cher en incertitude.
  • Mélanger les deux fait mécaniquement baisser la valorisation.

 

La solution prônée depuis des années par plusieurs actionnaires — séparer les actifs stables des actifs risqués — trouve enfin une oreille attentive au conseil.

 

Une sortie qui rebat les cartes du secteur minier africain

 

L’Afrique a longtemps été la zone où Barrick démontrait son savoir-faire opérationnel dans des environnements complexes. Le retrait simultané du Mali, de la RDC, de la Tanzanie et, déjà, de la Côte d’Ivoire laisserait un vide stratégique majeur.

 

Trois conséquences émergent :

 

1) Un appel d’air pour les concurrents

 

Agnico Eagle, Endeavour Mining, Zijin, Shandong : tous surveillent le dossier.
Les actifs africains de Barrick ne manquent pas d’acquéreurs.

 

2) Un déplacement du centre de gravité minier

 

Un retrait de Barrick renforcerait la montée en puissance d’acteurs chinois et de groupes africains ou moyen-orientaux, déjà opportunistes sur les mines sous pression réglementaire.

 

3) Un test grandeur nature pour les États africains

 

La façon dont le Mali, la RDC ou la Tanzanie géreront ce départ sera scrutée :

  • sécurité juridique,
  • stabilité fiscale,
  • gouvernance minière,
  • crédibilité des régimes.

 

Une sortie brutale de Barrick deviendrait un signal fort sur l’attractivité — ou la volatilité — du continent.

 

Une page est en train de se tourner

 

Rien n’est signé. Mais les lignes bougent vite, et les sources proches du dossier convergent toutes : la dynamique interne pousse Barrick vers une sortie ordonnée mais définitive du continent africain.

 

Pour un groupe qui a bâti une partie de son identité sur l’Afrique, l’événement serait historique.
Pour les États africains, c’est une alerte sur la nécessité d’offrir un environnement minier plus stable.
Pour les marchés, c’est le début d’une reconfiguration globale de la carte mondiale de l’or.

 

En clair : si Barrick s’en va, ce n’est pas un simple retrait — c’est une redistribution stratégique majeure du secteur minier international.