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  • 18/11/2025

Mamy Ravatomanga : Un « Ivoiro-Malgache » milliardaire au cœur d’une enquête pour blanchiment

L’affaire Maminiaina “Mamy” Ravatomanga ressemble de plus en plus à un feuilleton financier aux ramifications régionales. Pour le grand public, ce nom évoque peut-être un homme d’affaires discret. Pourtant, depuis octobre 2025, ce milliardaire d’origine malgache, devenu également citoyen ivoirien en 2023, se retrouve plongé dans une enquête tentaculaire pour blanchiment d’argent à l’île Maurice. Et cette fois, les conséquences pourraient toucher directement la Côte d’Ivoire.

 

Arrivé à Maurice dans la nuit du 11 au 12 octobre à bord de son jet privé, accompagné de sa famille et de l’ancien Premier ministre malgache Christian Ntsay, Mamy Ravatomanga a été interpellé quelques jours plus tard par la Financial Crimes Commission (FCC). L’homme d’affaires, qui dirige le puissant groupe SODIAT, est soupçonné d’avoir participé à des transferts financiers massifs, effectués via des entreprises situées à Maurice et dans d’autres juridictions offshore. Les autorités mauriciennes évoquent des montants particulièrement élevés, au point qu’elles ont gelé plusieurs comptes bancaires et saisi des documents liés à plus d’une centaine de sociétés.

 

Depuis son arrestation, le milliardaire est maintenu sous surveillance policière à l’hôpital Victoria, où il avait été admis pour des examens médicaux. Mais la FCC refuse sa libération sous caution, craignant un risque de fuite ou d’influence sur des témoins. Une nouvelle audience est attendue le 20 novembre, et le pays tout entier retient son souffle.

 

L’affaire, déjà explosive pour Maurice et Madagascar, prend une tournure encore plus sensible depuis la découverte de sa nationalité ivoirienne. En effet, en devenant citoyen de Côte d’Ivoire en 2023, Ravatomanga a ouvert la porte à un possible appui consulaire d’Abidjan. Sans que rien ne soit officiellement confirmé, plusieurs médias s’interrogent sur l’éventuelle implication de la diplomatie ivoirienne dans ce dossier délicat. Comme souvent, la simple possibilité suffit à créer le malaise.

 

Pour la Côte d’Ivoire, les enjeux sont multiples. Sur le plan diplomatique d’abord : Abidjan se retrouve indirectement associée à une affaire qui défraie la chronique dans la région. Une intervention, même limitée, pourrait être scrutée comme un signal politique, tandis qu’une absence totale de réaction pourrait être interprétée comme une prise de distance assumée. Dans les deux cas, le pays devra naviguer avec prudence.

 

Sur le plan financier ensuite : l’écosystème bancaire ivoirien est désormais sous pression. La double nationalité du mis en cause implique que les établissements ayant eu des liens avec lui – ou avec ses entreprises – devront revisiter leurs procédures KYC et leurs dispositifs de surveillance. Le secteur financier ivoirien, en pleine montée en puissance régionale, n’a pas intérêt à laisser planer le moindre doute sur sa capacité à détecter les profils à risque élevé.

 

Enfin, sur le plan réglementaire, ce dossier pourrait accélérer les réformes déjà en cours en matière de conformité LCB-FT. L’affaire Ravatomanga agit comme un test grandeur nature : elle rappelle que les montages financiers transfrontaliers, les sociétés écrans et les comptes multi-juridictionnels sont désormais une réalité quotidienne pour les institutions ivoiriennes. Et que le moindre relâchement peut se payer au prix fort, tant en réputation qu’en coopération internationale.

 

En somme, ce scandale dépasse largement le sort individuel de Mamy Ravatomanga. Il révèle la fragilité des frontières financières dans la région, expose la Côte d’Ivoire à des défis diplomatiques inattendus et place les acteurs de la conformité devant leurs responsabilités. Un dossier sensible, complexe, et qui n’a pas encore livré tous ses secrets.