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  • 08/09/2025

Gabon : Suppression des subventions pétrolières en 2026 – Une réforme budgétaire à haut risque et fort enjeu

Le 5 septembre 2025, le ministre gabonais du Pétrole et du Gaz, Sosthène Nguema Nguema, a confirmé la suppression des subventions étatiques sur les produits pétroliers à compter de janvier 2026. Cette mesure s’inscrit dans une série de réformes structurelles engagées par le gouvernement de transition dirigé par le président Brice Clotaire Oligui Nguema. Elle vise à rééquilibrer les finances publiques et à soutenir les ambitions du Plan national de croissance et de développement (PNCD 2026–2030), lancé officiellement le 23 juillet 2025.

 

Une charge budgétaire devenue insoutenable

 

Les subventions aux carburants ont représenté près de 110 milliards de FCFA en 2024, soit environ 0,9% du PIB gabonais. Ce montant a presque triplé par rapport à 2023 (45 milliards FCFA), en raison de la hausse des prix internationaux du pétrole et de la consommation domestique. Le projet de loi de finances 2025 prévoit encore 88 milliards FCFA pour cette ligne budgétaire.

 

Selon la Banque mondiale, ces subventions profitent majoritairement aux ménages urbains et aisés, motorisés, tandis que les populations rurales et vulnérables en bénéficient peu. Cette inefficacité sociale, couplée à une pression budgétaire croissante, a conduit les autorités à envisager leur suppression.

 

Objectifs et garde-fous de la réforme

 

La réforme poursuit plusieurs objectifs stratégiques :

  • Réduction du déficit budgétaire et réallocation des ressources vers les priorités du PNCD, notamment les infrastructures, l’éducation et la santé.
  • Modernisation du secteur énergétique, en cohérence avec le Plan Transfo 2025, qui prévoit la digitalisation des réseaux, la sécurisation des systèmes et la rationalisation des services publics sous le slogan « Un Gabonais, un compteur ».
  • Amélioration de la transparence budgétaire, avec une gestion plus rigoureuse des finances publiques.

 

Le gouvernement a précisé qu’il ne s’agit pas d’une libéralisation totale du marché des carburants. Des mécanismes d’atténuation sont en cours de discussion avec les distributeurs agréés, afin de limiter l’impact sur les prix à la pompe et de protéger les ménages modestes.

 

Réformes similaires en Afrique : leçons du Nigéria et du Ghana

 

Le Gabon rejoint plusieurs pays africains ayant récemment supprimé leurs subventions aux carburants. Les cas du Nigeria et du Ghana offrent des enseignements contrastés :

 

Pays

Année de suppression

Économies réalisées

Réactions sociales

Nigéria

Mai 2023

20 milliards USD en un an

Hausse des prix, files d’attente, grèves, inflation sur les transports et les biens de consommation

Ghana

Avril 2023

Non chiffré publiquement

Contestations sociales, suppression des indemnités de carburant pour les hauts fonctionnaires, débat sur les inégalités

 

Ces expériences montrent que la réussite de telles réformes dépend fortement de l’accompagnement social, de la communication gouvernementale et de la capacité à réinvestir les économies dans des secteurs prioritaires.

 

Impacts attendus pour les acteurs économiques et sociaux

 

Pour les entreprises, notamment dans les secteurs du transport, de la logistique et de l’agriculture, la réforme pourrait entraîner une hausse des coûts opérationnels. Pour les ménages, elle risque d’alourdir le panier de consommation, surtout en milieu urbain.

 

Cependant, elle ouvre aussi des perspectives :

  • Stimulation des investissements dans les énergies renouvelables
  • Réduction des distorsions de marché liées aux prix artificiels
  • Renforcement de la gouvernance économique

 

Le Plan Transfo 2025 prévoit notamment une meilleure gestion des infrastructures énergétiques, la digitalisation des systèmes et la réduction de la dette liée aux contrats énergétiques.

 

La suppression des subventions pétrolières au Gabon en 2026 est une réforme budgétaire majeure, dictée par des impératifs de soutenabilité et d’efficacité. Elle s’inscrit dans une vision stratégique plus large, portée par le PNCD 2026–2030, qui vise une croissance économique de 10% à moyen terme.

 

Pour réussir, cette réforme devra s’accompagner de mesures sociales ciblées, d’une communication transparente et d’une coordination intersectorielle. Elle représente aussi une opportunité éditoriale forte pour les médias économiques africains : analyser les réformes sous l’angle de la justice sociale, de la performance budgétaire et de la transition énergétique.