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  • 21/07/2025

Kenya : La Banque mondiale annonce 127 millions de dollars pour un filet social à double vocation

Le Kenya renforce son arsenal de protection sociale avec l’appui de la Banque mondiale, à travers un projet ambitieux qui allie inclusion économique et développement humain. Financé à hauteur de 127,5 millions de dollars par l’Association internationale de développement (IDA), ce programme, baptisé Kenya Social and Economic Inclusion Project 2 (KSEIP2), entend toucher près de 12 millions de citoyens parmi les plus vulnérables.

 

L’objectif affiché : ne plus cantonner la protection sociale à l’assistance immédiate, mais en faire un outil stratégique de transformation à long terme. Cette approche, articulée autour d’investissements dans la jeunesse, le soutien aux ménages précaires et la résilience face aux crises, s’inscrit dans une vision plus large de l’inclusion comme moteur de croissance.

 

Un projet qui prolonge une dynamique

 

Le KSEIP2 prend la relève d’un premier programme déjà mené à terme, qui avait permis de poser les bases d’un système d’aide sociale mieux structuré au Kenya. S’appuyant sur ces acquis, cette nouvelle phase prévoit un élargissement des transferts monétaires à des groupes d’âge ciblés : enfants, adolescents, femmes et personnes âgées. Ces transferts complètent ceux déjà fournis dans le cadre du National Safety Net Program (NSNP), initiative phare du gouvernement en matière de filets de sécurité.

 

Mais au-delà de l’assistance financière directe, le projet ambitionne d’introduire une dimension économique durable, en liant les bénéficiaires aux régimes publics d’épargne et d’assurance sociale, et en promouvant des activités génératrices de revenus résilientes au climat.

 

Miser sur l’humain pour soutenir l’économie

 

La Banque mondiale insiste sur cette double finalité du programme. « La croissance inclusive et la réduction de la pauvreté se concrétisent par la création d’emplois plus nombreux et de meilleure qualité », explique Qimiao Fan, directeur de division de la Banque mondiale pour le Kenya. Selon lui, le KSEIP2 prépare les enfants et les jeunes à devenir des adultes productifs, aide les familles à améliorer leurs moyens de subsistance et protège les acquis sociaux contre les aléas climatiques ou économiques.

 

Ce pari sur l’humain est central dans la stratégie kenyane. Dans un pays où près d’un tiers de la population vit encore sous le seuil de pauvreté, l’investissement dans le capital humain — notamment chez les plus jeunes — apparaît comme un levier essentiel de sortie durable de la précarité. L’idée est d’éviter les politiques sociales court-termistes pour construire une base de développement stable et inclusive.

 

Une réponse adaptée à la vulnérabilité climatique

 

Le Kenya, confronté à des sécheresses récurrentes dans plusieurs de ses régions, notamment dans le Nord et le Nord-Est, voit sa population exposée à des risques croissants. Le KSEIP2 prévoit donc un renforcement du système de réponse d’urgence, avec des mécanismes d’assistance sociale temporaire activables en cas de crise.

 

En parallèle, le projet entend moderniser les systèmes de prestation de services sociaux, afin de rendre l’aide publique plus efficace, mieux ciblée, et adaptée aux contextes locaux. Cette approche intégrée doit permettre d’éviter que les avancées sociales ne soient annulées par un choc climatique ou économique.

 

Une vision cohérente avec les ambitions nationales

 

Le projet KSEIP2 s’inscrit dans le cadre stratégique plus large du pays. Il répond à la Vision 2030 du Kenya, qui vise un développement économique et social durable, et s’aligne avec le Cadre de partenariat pays (CPF) conclu avec le Groupe de la Banque mondiale pour la période 2023–2028. Ce dernier met l’accent sur la résilience des ménages, la préparation nationale aux crises et le renforcement du capital humain.

 

Pour Shubha Chakravarty, économiste principale à la Banque mondiale et cheffe d’équipe du projet, cette cohérence d’ensemble est essentielle : « Le projet KSEIP2 soutient l’ambition du gouvernement de briser le cercle vicieux de la pauvreté en privilégiant les investissements en faveur des enfants et des adolescents, ainsi que des ménages productifs. »

 

Le programme incarne aussi un engagement constitutionnel fort du Kenya : garantir une sécurité sociale à tous les citoyens ne pouvant subvenir à leurs besoins.

 

Une politique sociale pensée comme levier économique

 

Avec ce projet, le Kenya tente de réconcilier politiques sociales et développement économique, dans une logique où protection ne rime plus avec dépendance, mais avec opportunité. Il s’agit de faire de l’inclusion un vecteur de croissance, et non un coût.

 

En articulant transferts sociaux, inclusion financière, emploi durable et résilience climatique, le KSEIP2 pourrait servir de modèle pour d’autres pays du continent confrontés à des défis similaires.