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  • 21/07/2025

Hydrocarbures / Torchage du gaz : 63 milliards de dollars de pertes pour l'industrie en 2024

Le gaspillage du gaz naturel atteint un niveau critique, fragilisant les efforts de transition énergétique et de lutte contre le changement climatique.

 

Le torchage du gaz naturel, cette pratique consistant à brûler du gaz associé à l’extraction du pétrole, ne faiblit pas. Pire : il repart à la hausse. En 2024, 151 milliards de mètres cubes (mmc) ont été brûlés dans le monde, soit le niveau le plus élevé depuis 2007, selon le dernier rapport Global Gas Flaring Tracker de la Banque mondiale. Ce volume représente une perte énergétique estimée à 63 milliards de dollars.

 

Le coût écologique est tout aussi alarmant : 389 millions de tonnes d'équivalent CO₂ ont été émises, dont 46 millions dues au méthane non brûlé, un gaz à effet de serre 80 fois plus puissant que le CO₂ à court terme.

 

« Alors que plus d’un milliard de personnes n’ont toujours pas accès à une énergie fiable (...), il est très frustrant de voir cette ressource naturelle gaspillée », déplore Demetrios Papathanasiou, directeur mondial de l’énergie à la Banque mondiale.

 

Des efforts inégaux selon les pays

 

Si certains États ont réussi à réduire leur niveau de torchage, les neuf plus gros pays torchant du gaz représentent à eux seuls 75% du volume total, tout en ne générant que moins de la moitié de la production mondiale de pétrole. Autrement dit, la surconsommation de torchères n’est pas liée à la taille du secteur pétrolier, mais bien à un manque de volonté politique ou technologique.

 

L’indicateur clé, l’intensité de torchage (gaz brûlé par baril de pétrole extrait), reste anormalement élevé depuis 15 ans. Un vrai paradoxe à l’heure où les États plaident pour une transition énergétique juste et durable.

 

L’initiative ZRF : une lueur d’espoir

 

Depuis 2015, la Banque mondiale promeut l’initiative Zéro torchage de routine d’ici 2030 (ZRF). Le rapport montre que les pays signataires enregistrent 12% de réduction de l’intensité de torchage, contre une hausse de 25% pour ceux qui n’y participent pas.

 

Mais pour accélérer la cadence, il faut aller plus loin. Le Partenariat mondial pour la réduction du torchage et du méthane (GFMR) multiplie les actions concrètes : subventions, assistance technique, conseils politiques, renforcement institutionnel… En Ouzbékistan, par exemple, 11 millions de dollars ont été investis pour détecter et colmater les fuites de méthane, réduisant potentiellement jusqu’à 100 000 tonnes d’émissions par an.

 

« Les gouvernements et les exploitants doivent faire de la réduction du torchage une priorité. (...) Nous devons transformer ce gaz gaspillé en moteur de développement économique », insiste Zubin Bamji, responsable du GFMR.

 

Une urgence mondiale, un enjeu africain

 

Pour l’Afrique, l’enjeu est double : la sécurité énergétique et le développement durable. Le rapport rappelle que le gaz torché chaque année représente une part importante de la consommation annuelle de gaz du continent. Ce qui est brûlé ailleurs pourrait couvrir des besoins énergétiques essentiels, en particulier pour les pays dépendants des importations.

 

Lutter contre le torchage n’est donc pas seulement une question climatique, mais un levier d’accès à l’énergie pour des millions de foyers. Un défi technologique, mais surtout une urgence de gouvernance.