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  • 22/09/2025

RDC : Kinshasa troque l’interdiction d’exporter le cobalt contre un système de quotas

La République démocratique du Congo (RDC), premier producteur mondial de cobalt, a annoncé qu’elle lèverait, à compter du 16 octobre 2025, l’interdiction d’exporter ce minerai stratégique, en vigueur depuis février dernier. Cette mesure sera remplacée par un système de quotas annuels, a indiqué l’Autorité de régulation et de contrôle des marchés des substances minérales stratégiques.

 

Selon le nouveau dispositif, les mineurs congolais seront autorisés à expédier 18 125 tonnes de cobalt pour le reste de l’année 2025, puis 96 600 tonnes par an en 2026 et 2027. Une décision qui constitue un véritable tournant pour le pays, qui fournit à lui seul environ 70% du cobalt mondial, essentiel à la fabrication des batteries électriques, des smartphones et de nombreuses technologies de transition énergétique.

 

Une interdiction aux conséquences lourdes

 

Kinshasa avait initialement suspendu les exportations en février, après que les cours du cobalt avaient atteint leur plus bas niveau depuis neuf ans. Cette interdiction prolongée en juin avait provoqué des secousses dans l’industrie minière mondiale : les géants Glencore et China Molybdenum Company (CMOC) avaient été contraints de déclarer la force majeure, incapables d’honorer leurs contrats d’approvisionnement.

 

Quotas pour stabiliser les prix et reprendre la main

 

Le passage à un système de quotas vise à réguler l’offre et à éviter l’effondrement des prix, tout en limitant la constitution de stocks excédentaires. Les quotas seront distribués en fonction des volumes d’exportation historiques de chaque entreprise.

 

Ce mécanisme reçoit le soutien du groupe anglo-suisse Glencore, mais il est contesté par le chinois CMOC, qui y voit une contrainte supplémentaire. En toile de fond, le bras de fer commercial entre Occidentaux et Chinois sur les minerais critiques se poursuit, et la RDC apparaît une fois de plus comme l’arbitre d’un marché hautement stratégique.

 

Sécurité et souveraineté en ligne de mire

 

Au-delà des considérations économiques, Kinshasa entend également resserrer le contrôle sur un secteur marqué par une forte présence de mineurs artisanaux, dont l’activité échappe largement à toute traçabilité. Une situation qui complique la conformité des chaînes d’approvisionnement pour les acheteurs internationaux et alimente le commerce illégal.

 

Le gouvernement affirme par ailleurs que cette exploitation informelle contribue à financer les activités des groupes rebelles, notamment le M23 dans l’est du pays. L’instauration des quotas permet ainsi à l’État congolais de renforcer son autorité sur la filière et de réduire les flux parallèles.

 

Une partie réservée au marché local

 

Le régulateur congolais a précisé que 10% des volumes futurs seraient réservés à des projets nationaux stratégiques, afin de soutenir le développement du raffinage local et des industries de transformation. Les quotas pourront être ajustés selon l’évolution du marché mondial et les progrès de l’industrialisation locale.

 

En outre, l’État se réserve le droit de racheter les stocks excédentaires au-delà des quotas trimestriels, une manière de constituer ses propres réserves stratégiques.

 

Un signal fort à l’industrie mondiale

 

En choisissant de passer d’une interdiction stricte à une régulation par quotas, la RDC affiche sa volonté de ne plus être un simple pourvoyeur de matières premières brutes, mais un acteur déterminé à peser sur les prix, sécuriser ses intérêts nationaux et attirer des investissements dans le raffinage local.

 

Pour les constructeurs de batteries et de véhicules électriques, cette décision implique une équation délicate : assurer un approvisionnement suffisant dans un marché où l’offre est désormais sous la surveillance directe de Kinshasa.