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  • 24/07/2025

Tchad : le FMI mise sur les réformes pour un redressement à 625 millions de dollars

Le FMI accorde un nouvel appui budgétaire à N'Djamena, assorti de conditions strictes pour redresser les finances publiques et accélérer la transformation structurelle.


Face à une accumulation de chocs exogènes et une pression budgétaire croissante, le Tchad vient d’obtenir une bouffée d’oxygène. Le Fonds monétaire international (FMI) a approuvé, le 25 juillet 2025, un nouvel accord au titre de la Facilité élargie de crédit (FEC) pour un montant de 625 millions de dollars sur quatre ans, soit l’équivalent de 325% de la quote-part du pays. Un premier décaissement immédiat de 38,5 millions de dollars a été autorisé.


Ce programme vise à soutenir la mise en œuvre du Plan national de développement 2025-2030, dans un contexte de pressions financières intenses dues à la baisse des prix du pétrole, à l’afflux massif de réfugiés soudanais, et à la diminution du soutien des partenaires internationaux.


Des objectifs clairs : rigueur budgétaire, inclusion sociale et gouvernance renforcée


Le nouveau programme repose sur trois axes principaux :


- Assurer une viabilité budgétaire à moyen terme, en créant un espace fiscal pour financer des projets de développement prioritaires ;


- Accroître les dépenses sociales ciblées, notamment dans l’éducation et la protection sociale, pour faire reculer la pauvreté ;


- Améliorer la gouvernance et le climat des affaires, afin de stimuler l’investissement privé et renforcer la transparence dans les secteurs stratégiques.


« Le Tchad est confronté à d’énormes défis découlant des chocs humanitaires, climatiques et sécuritaires, aggravés par la volatilité des prix du pétrole et la baisse de l'aide publique au développement », a déclaré Boileau Clarke, directeur général adjoint du FMI, en marge de l’annonce officielle. Il salue par ailleurs « l'engagement fort des autorités tchadiennes en faveur de la stabilité macroéconomique et des réformes », dans la foulée de la fin de la transition politique.


Une économie à redresser sous contrainte


Les prévisions du FMI annoncent une croissance modérée, avec un PIB réel en hausse de 3,3% en 2025, après 3,5% en 2024. Le secteur pétrolier devrait reculer légèrement (-0,7%), mais la croissance hors pétrole se maintiendra autour de 4,2%, portée par les secteurs agricoles et de services.


L’inflation, estimée à 5,1% en 2024, devrait ralentir à 4% en 2025, favorisant une relative stabilité des prix. En revanche, la balance courante se creusera davantage, avec un déficit attendu à -2,5% du PIB. Cette dégradation reflète la hausse des importations (notamment alimentaires et sécuritaires) dans un contexte de recul des recettes pétrolières.


Des réformes fiscales et sociales décisives


Pour répondre à ces déséquilibres, le FMI préconise un effort soutenu sur les recettes non pétrolières, via :


- une hausse ciblée des impôts,


- la réduction des exonérations fiscales injustifiées,


- et la numérisation de l’administration fiscale.


Sur le front des dépenses, il s’agira de rationaliser les dépenses non prioritaires, notamment en maîtrisant la masse salariale et en encadrant les procédures d’urgence.


Le Tchad s’est également engagé à renforcer la protection sociale grâce à l’extension du registre social unifié et à l’élargissement de l’identification biométrique. Ces dispositifs permettront de mieux cibler les bénéficiaires et de limiter les détournements.


Pétrole et gouvernance : la pression monte


Le secteur pétrolier, pilier des finances publiques, reste sous étroite surveillance. Le FMI a salué l’engagement des autorités à publier un audit indépendant sur les revenus pétroliers, à améliorer la supervision des entreprises publiques, et à lancer un diagnostic de gouvernance avec l’appui du Fonds.


Ces mesures sont perçues comme un pas vers plus de redevabilité, dans un pays où la transparence budgétaire reste un chantier inachevé.


Enjeu régional pour la CEMAC


Au-delà du cas tchadien, cet accord participe à l’effort régional de stabilisation au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), en contribuant à la stabilité extérieure de la zone et à la convergence budgétaire.


En somme, ce nouveau programme du FMI ne se limite pas à une perfusion financière. Il s’agit d’un véritable contrat de confiance, basé sur des engagements de réforme structurelle. La réussite dépendra autant de la volonté politique à N'Djamena que du suivi rigoureux de la mise en œuvre.


Le financement est là. Les réformes aussi. Reste à transformer cette opportunité en levier de croissance inclusive et durable, au bénéfice des Tchadiens.

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