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  • 14/07/2025

Afrique du Sud / Pétrole : Au large du Cap, Shell creuse l’espoir… et la polémique

 Alors que l’Afrique du Sud fait face à une crise énergétique persistante, la compagnie pétrolière Shell a obtenu une autorisation environnementale pour explorer des ressources offshore dans les eaux profondes du bassin d’Orange, au large du Cap Nord. Cette décision, relayée par Reuters vendredi dernier, pourrait représenter un tournant stratégique pour le pays, tout en ravivant les tensions entre impératifs économiques et protection de l’environnement.

 

Le projet de Shell porte sur le forage de cinq puits dans un bloc ultra-profond situé entre 2 500 et 3 200 mètres de profondeur. Cette zone est une extension du bassin d’Orange, qui s’étend jusqu’en Namibie, pays où les découvertes récentes de TotalEnergies et Shell ont mis au jour des réserves estimées à plusieurs milliards de barils. L’enjeu est de taille : dans un contexte de raréfaction des capacités de raffinage – réduites de moitié en Afrique du Sud depuis 2020 – et d’une dépendance accrue aux importations de produits pétroliers (plus de 10 milliards de dollars par an), toute découverte majeure pourrait améliorer la sécurité énergétique nationale et alléger la pression sur la balance commerciale.

 

Cependant, ce développement s’inscrit dans un climat juridique et social tendu. De nombreux projets pétroliers menés par Shell en Afrique du Sud ont été contestés en justice. En 2021, la société avait dû interrompre ses activités d'exploration sur la côte est du pays, après des recours judiciaires initiés par des ONG et des communautés locales qui dénonçaient un manque de consultation préalable et des menaces sur la biodiversité marine. Le projet actuel pourrait subir le même sort, alors que la Cour suprême sud-africaine doit statuer cette année sur ces contentieux environnementaux toujours en cours.

 

Le bassin d’Orange est devenu une zone d’intérêt stratégique pour les grandes compagnies énergétiques, mais également un théâtre de confrontation entre ambitions industrielles et résistance locale. Des pêcheurs, déjà affectés par la dégradation de leur environnement, expriment leurs craintes face à l’intensification de l’activité pétrolière offshore. Les études sismiques nécessaires à l’exploration peuvent perturber les mammifères marins comme les baleines, qui migrent dans ces zones.

 

En parallèle, les pressions internationales pour une transition énergétique juste gagnent en intensité. L’Afrique du Sud, signataire des accords climatiques, s’est engagée à réduire progressivement sa dépendance aux énergies fossiles, avec le soutien financier de partenaires tels que l’Union européenne, les États-Unis, ou la Banque mondiale. L’approbation d’un nouveau projet pétrolier soulève donc des interrogations sur la cohérence de la stratégie gouvernementale dans ce domaine.

 

Shell, de son côté, reste discrète sur le calendrier des forages. Mais cette autorisation constitue déjà un signal fort : le pays explore toutes les pistes pour assurer son autonomie énergétique, quitte à emprunter des voies controversées. Alors que la décision judiciaire sur les précédents forages est attendue dans les prochains mois, l’Afrique du Sud se retrouve face à un dilemme majeur : miser sur ses ressources fossiles pour stabiliser son économie ou accélérer sa transition vers les énergies renouvelables.

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