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  • 23/10/2025

Angola : La (re)naissance du cuivre — pourquoi l’arrivée de Tetelo/Mavoio change la donne

L’Angola inaugure un tournant stratégique : la mise en production d’un important projet cuprifère dans la province du Uíge. Le gouvernement annonce l’inauguration du site — nommé Tetelo (associé au complexe Mavoio) — pour le 29 octobre 2025, marquant le retour à une exploitation cuprifère d’envergure après des décennies d’activité limitée.

 

Le projet, opéré par la société chinoise Shining Star Icarus en partenariat local, représente un investissement d’environ 250 millions de dollars. Selon les autorités, la première phase — exploitation à ciel ouvert — doit produire l’équivalent d’environ 25 000 tonnes de concentré de cuivre par an pendant les deux premières années, avant une transition attendue vers l’exploitation souterraine à partir de la seconde moitié de 2026. C’est une montée en gamme pour un pays historiquement centré sur le pétrole.

 

Le gouvernement met en avant les retombées sociales : plus de 1 000 emplois directs annoncés et des chantiers d’accompagnement (routes, centres de formation technique, systèmes de gestion des ravins). Les autorités insistent sur le caractère national de l’emploi, même si des compétences étrangères restent nécessaires pour le démarrage.

 

Sur la carte des ressources, Tetelo/Mavoio occupe une aire conséquente : certains communiqués évoquent une emprise de l’ordre de 2 000 km² pour le périmètre exploré, ce qui illustre l’ambition géologique du projet mais invite aussi à la prudence sur l’impact territorial.

 

Au plan macroéconomique, l’argument du gouvernement est simple : diversifier les revenus d’un État encore vulnérable aux chocs pétroliers. Le cuivre est une matière « stratégique » pour la transition énergétique mondiale. Pour l’Angola, une production régulière peut accroître les recettes d’exportation, attirer des investissements complémentaires (transformation locale, logistique) et stimuler les économies régionales.

 

Mais les signaux d’alerte sont clairs. Premièrement, la gouvernance des revenus miniers demeure la condition sine qua non pour que les revenus servent le développement durable et non la rente concentrée. Deuxièmement, l’environnement : l’exploitation à ciel ouvert engendre défrichement, risques hydrologiques et poussières ; la promesse de centres de confinement et de reboisement doit être scrutée dans les faits. Enfin, la chaîne de valeur : sans raffinerie locale ou projets d’aval, l’Angola risque d’exporter principalement du concentré et de laisser la valeur ajoutée ailleurs.

 

Les partenaires chinois jouent un rôle central : ils apportent capitaux, savoir-faire et chaînes d’approvisionnement. Cela ouvre des opportunités rapides mais pose aussi la question des conditions contractuelles, des clauses locales d’emploi et de contenu national. Les expériences comparées en Afrique montrent que la présence d’investisseurs étrangers peut être positive si l’État impose des obligations strictes de transfert de compétences et de contenu local.

 

Pour les communautés locales, l’enjeu immédiat est double : emploi et infrastructures contre perturbations des activités rurales (agriculture, accès à l’eau). La promesse d’emplois doit être suivie d’un calendrier précis de formation et d’embauches locales. Sans contrôle indépendant, la société civile et les autorités locales risquent d’être surprises par un démarrage trop rapide.

 

En conclusion, Tetelo/Mavoio est plus qu’une coupure de ruban : c’est un test pour l’Angola. Si les autorités traduisent l’investissement en politique industrielle claire (transformation locale, règlementation environnementale stricte, transparence des recettes), le pays peut amorcer une diversification réelle. À l’inverse, sans garde-fous, le projet risque de reproduire des trajectoires où les richesses minérales profitent peu aux territoires exploités. Les prochains mois (et les rapports de production et d’emploi) seront déterminants.