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  • 07/11/2025

Crédit téléphonique en Côte d’Ivoire : Le bras de fer entre Wave et l’ARTCI

Abidjan – un tournant pour l’écosystème mobile

 

Le marché ivoirien voit se jouer une bataille à première vue technique — mais aux enjeux majeurs. Wave (Côte d’Ivoire), acteur émergent du paiement mobile, souhaite permettre à ses utilisateurs d’acheter du crédit téléphonique directement depuis son application. Le hic : l’Autorité de Régulation des Télécommunications/TIC de Côte d’Ivoire (ARTCI) a repoussé la décision concernant cette demande, lors d’une audience tenue le 6 novembre 2025.
Autrement dit : l’ouverture de ce service reste suspendue.

 

Du dépôt de plainte à l’audience

 

Au cœur de l’affaire : depuis 2021, Wave affirme être bloquée dans sa volonté de vendre des recharges téléphoniques, faute d’accès aux interfaces techniques (API) des trois principaux opérateurs ivoiriens — Orange CI, MTN CI et Moov Africa CI.
Wave a donc saisi l’ARTCI, l’accusant de pratiques anticoncurrentielles.

Les opérateurs rétorquent que la vente de crédit téléphonique relève d’un « service financier » plutôt que d’un service de télécommunications — un argument de compétence que l’ARTCI devra trancher.
Par ailleurs, l’ARTCI a lancé fin juin 2025 une consultation publique pour encadrer l’accès aux API des opérateurs pour les plateformes numériques.

 

Pourquoi ce litige ?

 

Infrastructure et technique

 

L’accès aux API est ici essentiel : sans ces interfaces, Wave ne peut pas automatiser la commande de crédit téléphonique, ni intégrer cette option dans son application mobile. Ce blocage technique empêche l’expansion de l’offre.

 

Régulation et juridiction

 

Le cadre légal ivoirien donne à l’ARTCI le pouvoir de réguler les télécommunications. Mais l’opposant à l’expertise des opérateurs est clair : ceux‑ci soutiennent que la revente de crédit est un service financier, ce que l’ARTCI n’encadre pas traditionnellement. Le débat sur « quel régulateur pour quel service » est donc central.

 

Concurrence et modèle économique

 

Wave soutient que se voir refuser l’accès aux mêmes canaux que les opérateurs historiques est une entrave à la concurrence. D’un autre côté, les opérateurs souhaitent préserver leur part de marché dans la distribution de recharges téléphoniques. Le résultat : un jeu d’équilibre entre innovation et protection des positions établies.

 

Quels enjeux pour les acteurs ?

 

  • Pour Wave : obtenir l’autorisation signifie accès à un nouveau canal de revenus, renforcement de sa plateforme et meilleure fidélisation des clients.
  • Pour les opérateurs : l’ouverture de ce canal représenterait un affaiblissement potentiel de leur contrôle sur la valeur ajoutée liée à la recharge téléphonique.
  • Pour l’ARTCI : la décision doit poser un cadre clair pour l’avenir du numérique en Côte d’Ivoire — faire jouer la concurrence tout en garantissant la sécurité des services.
  • Pour les consommateurs : potentiellement, une plus grande liberté dans le choix des plateformes de recharge, une meilleure fluidité de service, voire une réduction des coûts.

 

Impacts à court et moyen terme

 

  • Une décision favorable à Wave marquerait une avancée pour les fintechs ivoiriennes : accès aux infrastructures, ouverture des services.
  • Le contraire pourrait maintenir un modèle fermé et décourager certains investissements dans l’innovation mobile.
  • Le délai actuel crée de l’attente : l’incertitude n’est jamais positive pour un secteur où la vitesse de déploiement est clé.
  • Et au‑delà : cette affaire interroge le modèle d’interopérabilité des infrastructures numériques en Côte d’Ivoire.

 

Ce dossier ne se limite pas à la simple vente de crédit téléphonique. Il est le reflet — parfois tendu — de la confrontation entre tradition et innovation, entre opérateurs historiques et nouveaux entrants, entre régulation et libération des services numériques. La décision de l’ARTCI sera un marqueur pour l’écosystème mobile money et fintech en Afrique francophone. À suivre de près pour tous ceux qui, comme nous chez BankAssur Afrik+, s’intéressent à l’évolution des services numériques africains.