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  • 02/10/2025

Ghana : Un cadre réglementaire sur la finance islamique attendu d’ici fin 2025


Le Ghana veut doter son secteur financier d’un cadre réglementaire dédié à la finance islamique d’ici fin 2025, avec pour ambition de renforcer l’inclusion financière et d’attirer de nouveaux capitaux. Cette réforme, jugée structurante, vise à encadrer de façon cohérente la banque, les marchés de capitaux et l’assurance, à travers un cadre de gouvernance sharia robuste.

La Banque du Ghana (BoG), la Securities and Exchange Commission et la National Insurance Commission travaillent de concert pour harmoniser les différents cadres réglementaires. Des adaptations sont envisagées pour formaliser la gouvernance charia (conseils de supervision, normes de conformité) et préciser les modalités d’octroi de licences.

Cette initiative s’inscrit dans un projet gouvernemental plus large visant à porter le taux d’inclusion financière à 85 % en 2028, contre 58 % aujourd’hui, en diversifiant la palette de produits proposés aux quelque six millions de ghanéens encore dépourvus de comptes formels bancaires ou d’épargne classiques.

Selon Ernest Addison, gouverneur de la Banque centrale, le futur dispositif couvrira la banque de détail, la microfinance, les sukuk et l’assurance takaful, avec pour objectif d’offrir des produits éthiques et attirer des flux de capitaux du Golfe vers les secteurs productifs du pays en croissance.

Architecture réglementaire et fiscalité attendues

Pour certains analystes, la valeur ajoutée du cadre ghanéen réside dans l’unification prévue des trois volets (banque, assurance, marché des capitaux) sous une même autorité de conformité, un choix censé limiter les divergences d’interprétation juridique et rassurer les investisseurs institutionnels locaux sur le long terme.

La législation sera soumise au Parlement en deux étapes, a indiqué la vice-ministre des Finances Abena Osei-Asare, précisant que le premier texte fixera la définition légale des produits, avant un projet de loi budgétaire intégrant un traitement fiscal neutre, indispensable à la compétitivité des nouveaux instruments financiers islamiques.

Contraintes et perspectives

Malgré l’élan réglementaire salutaire, plusieurs défis ont été identifiés à savoir le besoin de compétences locales (jurisprudence islamique, structuration de produits), la sensibilisation du public et des clients corporates, ainsi que l’harmonisation entre normes charia et exigences prudentielles locales. La mise en place d’instances de supervision charia indépendantes et de procédures de contrôle robustes restera déterminante pour la crédibilité du dispositif et la confiance des investisseurs.

Des académiciens et praticiens au Ghana soulignent aussi l’importance d’un cadre légal clair et favorable sur la licence, la fiscalité et le traitement comptable des contrats islamiques (mudaraba, murabaha, ijara), afin d’éviter les ambiguïtés et d’assurer la neutralité concurrentielle avec la banque conventionnelle.

Les annonces ont suscité un écho favorable au sein de l’écosystème financier local et des réseaux spécialisés de la finance islamique, où l’on salue une « échéance claire » et une approche inter régulateurs jugée essentielle à la cohérence du marché. Des acteurs privés ont commencé à cadrer leur communication autour de produits « éthiques » compatibles, en anticipant le futur cadre technique et de gouvernance. Le secteur bancaire privé a commencé à communiquer sur une approche « éthique abrahamique » compatible avec les principes islamiques, signe d’un intérêt croissant des institutions pour une offre de produits alignés avec ces standards.

Appuis multilatéraux

Les partenaires multilatéraux observent la démarche avec intérêt : la Banque mondiale s’est dite prête à fournir une assistance technique, tandis que le Fonds monétaire international surveille l’impact macroéconomique, notamment sur la dette publique, si Accra venait à privilégier les sukuk pour son financement futur souverain.

La réussite du projet dépendra de la qualité des textes et de la capacité à former les équipes des banques et des superviseurs. Si le calendrier est respecté, le Ghana rejoindrait le groupe croissant d’économies africaines ayant adopté un cadre réglementaire pour la finance islamique et pourrait, à terme, explorer des émissions de sukuk pour des besoins d’infrastructure ou de gestion de la dette, à l’instar d’expériences menées ailleurs sur le continent. Les prochains mois seront décisifs pour la rédaction finale des textes, les consultations avec le marché et la préparation opérationnelle des institutions financières.