Le 4 août 2025, la Guinée a secoué l’industrie mondiale de l’aluminium en révoquant la concession minière de Guinea Alumina Corporation (GAC), filiale d’Emirates Global Aluminium (EGA). Ce décret, annoncé à la télévision nationale par le président Mamadi Doumbouya, transfère les actifs de GAC à une entité étatique, Nimba Mining SA, sans indemnisation. Cette décision, qualifiée d’« expropriation » par EGA, illustre la quête de souveraineté économique de la Guinée et menace des milliers d’emplois locaux. Que s’est-il passé, et quelles en sont les conséquences ?
Une concession stratégique au cœur du conflit
La Guinée est le deuxième producteur mondial de
bauxite, un minerai essentiel pour fabriquer l’alumine, puis l’aluminium,
utilisé dans tout, des canettes aux avions. GAC exploitait une concession de
690 km² à Boké, riche de 400 millions de tonnes de bauxite. Depuis 2019, elle
exportait environ 14 millions de tonnes par an, soit 2 à 3% de l’offre
mondiale. Mais le gouvernement guinéen reproche à GAC de ne pas avoir construit
une raffinerie d’alumine, qui transformerait la bauxite brute en un produit
plus précieux, générant davantage de revenus et d’emplois.
« Pendant près de 20 ans, GAC a bénéficié
d’avantages fiscaux sans construire une raffinerie en Guinée, contrairement à
ses engagements », a déclaré Amara Camara, ministre secrétaire général de la
présidence, dans une allocution télévisée le 4 août 2025. Cette critique
reflète la frustration de la junte militaire, au pouvoir depuis le coup d’État
de 2021, face aux entreprises étrangères exportant des matières premières sans
transformation locale.
Une tension qui couve depuis des mois
Le conflit n’est pas nouveau. En juin 2024, GAC
avait signé un accord avec Chinalco, géant chinois de l’aluminium, pour
construire une raffinerie d’une capacité de 1,2 million de tonnes d’alumine par
an d’ici septembre 2026, pour un coût de 4 milliards de dollars. Mais le
gouvernement jugeait cet engagement trop vague. En octobre 2024, il suspend les
exportations de GAC, provoquant une hausse des prix mondiaux de l’aluminium
(+2,5%) et de l’alumine (+4,2%). En mai 2025, une mise en demeure accuse GAC de
violer le Code minier guinéen, menant à la révocation finale.
EGA conteste vigoureusement cette décision. «
Cette expropriation de facto est injustifiée et viole nos droits contractuels
», a déclaré un porte-parole d’EGA dans un communiqué du 5 août 2025.
L’entreprise, qui a investi 1,4 milliard de dollars dans la mine, annonce des
recours devant des tribunaux internationaux.
Un coup dur pour l’économie locale
La révocation a des conséquences immédiates à
Boké, une région dépendante de l’activité minière. GAC employait 3 200
personnes, dont 96% de Guinéens. En juillet 2025, l’entreprise annonçait déjà
la suppression de 2 000 emplois en raison de la suspension de ses opérations. «
Ces licenciements touchent des familles entières », explique un représentant
communautaire local à Reuters. EGA revendique avoir contribué à hauteur de 244
millions de dollars à l’économie guinéenne en 2024, dont 700 000 dollars pour
des projets sociaux à Boké.
Une stratégie de souveraineté économique
La Guinée, dirigée par Mamadi Doumbouya,
s’inscrit dans une vague régionale de nationalisation des ressources. Des pays
comme le Mali, le Niger et le Burkina Faso renégocient également les contrats
miniers pour maximiser les bénéfices locaux. En transférant la concession à
Nimba Mining SA, la Guinée veut intégrer les actifs de GAC à ceux de la
Compagnie des Bauxites de Guinée (CBG), où l’État détient 49%. Objectif :
accélérer la construction de raffineries pour transformer la bauxite, dont la
valeur peut être multipliée par dix une fois convertie en alumine.
Cette stratégie a porté ses fruits à court terme.
Au premier semestre 2025, les exportations guinéennes de bauxite ont bondi de
36%, atteignant 99,8 millions de tonnes, principalement grâce à la demande
chinoise. Mais la révocation pourrait freiner les investissements étrangers. «
Les décisions unilatérales comme celle-ci risquent de refroidir les
investisseurs », avertit un analyste de Bloomberg.
Répercussions sur le marché mondial
La Guinée fournit environ 25% de la bauxite
mondiale. La suspension des opérations de GAC en 2024 avait déjà perturbé les
marchés, et la révocation pourrait accentuer cette volatilité. Les analystes
estiment qu’une perturbation prolongée pourrait faire grimper les prix de
l’alumine de 30 dollars par tonne. EGA, qui alimente sa raffinerie d’Al
Taweelah aux Émirats arabes unis, a sécurisé un approvisionnement alternatif
via un contrat avec Alcoa pour 15,6 millions de tonnes d’alumine sur huit ans.
Mais la perte de GAC reste un revers stratégique.
Un précédent pour l’Afrique de l’Ouest
La décision guinéenne envoie un message clair aux
multinationales comme Rio Tinto ou Rusal, actives dans le pays. En mai 2025, la
Guinée a révoqué les licences de 46 autres sociétés minières pour des raisons
similaires, bien que moins médiatisées. « La Guinée redéfinit les règles du jeu
pour les ressources naturelles », note un expert en économie minière à Jeune
Afrique. Mais le défi reste de taille : construire une raffinerie nécessite des
milliards de dollars et une infrastructure énergétique robuste, dans un pays où
l’électricité reste un obstacle majeur.
Vers une bataille juridique
EGA ne compte pas rester passive. L’entreprise
prépare des arbitrages internationaux, arguant que la révocation viole les
principes de l’État de droit. Ces procédures pourraient durer des années, mais
elles reflètent une lutte plus large entre les multinationales et les États
africains pour le contrôle des ressources. Pendant ce temps, la Guinée mise sur
Nimba Mining SA pour relancer la production et avancer vers son objectif de
transformation locale.
Une leçon pour l’avenir
La bataille entre EGA et la Guinée illustre un
tournant dans les relations économiques en Afrique. Les gouvernements, portés
par une vague de souveraineté, exigent plus de valeur ajoutée. Mais les
décisions radicales, comme la révocation sans indemnisation, risquent
d’éloigner les investisseurs nécessaires pour financer des projets coûteux. À
Boké, les familles des travailleurs licenciés attendent des réponses. Sur les
marchés mondiaux, les industriels surveillent les prix. Et à Conakry, Le gouvernement
joue une carte audacieuse pour redessiner l’avenir économique de la Guinée.
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