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  • 05/08/2025

Croissance au Zimbabwe : Entre ambitions chiffrées et réalité climatisée

Après une année 2024 marquée par la sécheresse et une croissance atone, le Zimbabwe veut croire à une embellie. Le gouvernement anticipe une progression moyenne du PIB de 5% entre 2026 et 2029, après un rebond espéré de 6% en 2025. Un pari risqué mais structuré, selon les orientations du Budget Strategy Paper 2026.

 

C’est un scénario de relance modérée, mais optimiste, que dessine Harare pour les prochaines années. Porté par les secteurs clés que sont l’agriculture, l’exploitation minière, les technologies de l’information et l’énergie, le Zimbabwe espère tourner la page d’une décennie marquée par l’instabilité économique.

 

En 2024, le pays n’a enregistré qu’une croissance inférieure à 2%. En cause : la sécheresse provoquée par le phénomène El Niño, qui a durement affecté les récoltes et compromis la sécurité alimentaire de millions de Zimbabwéens. Ce coup d’arrêt n’est pas anodin dans un pays où plus de 60% de la population dépend de l’agriculture de subsistance.

 

Une croissance conditionnée à la pluie et à la stabilité

 

Selon le ministère des Finances, les prévisions de croissance de 5% entre 2026 et 2029 reposent sur plusieurs hypothèses :

 

  • un retour à des précipitations normales ;
  • un environnement macroéconomique stable ;
  • une augmentation de la productivité dans les secteurs porteurs ;
  • et une maîtrise de l’inflation autour de 12,7% en 2026, grâce à des politiques budgétaires et monétaires strictes.

 

“Nous savons que l’environnement est incertain, mais nous avançons avec des mesures proactives pour stabiliser la croissance”, a déclaré le ministre des Finances, Mthuli Ncube, lors de la présentation du Budget Strategy Paper 2026.

 

Des risques majeurs en embuscade

 

Le document stratégique reconnaît toutefois une série de menaces qui pourraient réduire à néant ces ambitions :

 

  • les variations climatiques extrêmes ;
  • les perturbations persistantes dans la distribution d’électricité ;
  • et la volatilité des cours mondiaux des produits de base (or, platine, lithium, etc.), dont dépend largement l’économie minière du pays.

 

À cela s’ajoute une situation sociale fragile et un climat politique sous tension à l’approche des prochaines échéances électorales.

 

Un cadrage budgétaire plus rigoureux

 

Pour 2026, le gouvernement zimbabwéen prévoit un budget basé sur des recettes de 309,9 milliards de ZiG (environ 11,57 milliards de dollars) et des dépenses de 335,6 milliards de ZiG (12,53 milliards de dollars), soit un déficit inférieur à 3% du PIB.

 

Les secteurs prioritaires sont clairement identifiés :

 

  • Agriculture, pour renforcer la résilience alimentaire ;
  • Infrastructures, en particulier les routes et l’énergie ;
  • Santé et éducation, dans une logique de développement humain ;
  • Protection sociale et adaptation au changement climatique.

 

Pour financer ces ambitions, Harare mise sur une amélioration du recouvrement fiscal, la lutte contre la contrebande, et une campagne active pour faire respecter les obligations fiscales.

 

Une ambition crédible, mais fragile

 

L’ambition de croissance du Zimbabwe n’est pas irréaliste en soi. Le pays dispose de ressources naturelles importantes, d’un tissu agricole extensif, et d’un potentiel de développement dans les TIC. Mais les fondamentaux macroéconomiques restent fragiles : inflation encore élevée, dette publique sous surveillance, défiance des bailleurs de fonds internationaux.

 

La volonté politique est visible sur le papier. Reste à voir si elle se traduira par des réformes structurelles concrètes, une lutte rigoureuse contre la corruption, et une gestion efficace des chocs climatiques à venir.

 

Le Zimbabwe veut croire à sa relance économique. Mais entre les bonnes intentions budgétaires et la réalité des marchés, il reste une marge d’incertitude que seule la mise en œuvre — rigoureuse et inclusive — pourra réduire.