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  • 17/07/2025

Finance : La Côte d’Ivoire conquiert le marché japonais avec son premier Samouraï Bond

Le 17 juillet 2025 marque une étape historique pour la Côte d’Ivoire et pour l’Afrique subsaharienne : la réussite de sa première émission de Samouraï Bond sur le marché obligataire japonais. Avec une levée de 50 milliards de yens – environ 300 millions d’euros – à un taux de 2,3% sur dix ans, le pays fait son entrée sur un marché très exigeant et peu accessible aux émetteurs africains. Ce succès traduit une stratégie financière ambitieuse et réfléchie, visant à diversifier ses sources de financement tout en renforçant sa crédibilité internationale.

 

Un nouveau terrain de jeu : le Japon

 

Le marché japonais, troisième plus grand marché obligataire au monde, demeure difficile d’accès pour les pays africains en raison de normes strictes en matière de transparence, de stabilité macroéconomique et de discipline budgétaire. Réussir à y émettre des obligations est donc un signe fort de confiance, notamment parce que les investisseurs japonais sont réputés pour leur prudence et leur rigueur.

 

Cette opération a d’ailleurs été garantie par la Japan Bank for International Cooperation (JBIC), institution publique notée A+, ce qui renforce la crédibilité de l’émission. De surcroît, le label « Sustainability Bond » obtenu par cette émission atteste du respect de critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance), des éléments essentiels pour attirer les investisseurs institutionnels japonais, très attentifs à la durabilité des projets financés.

 

Une stratégie de diversification assumée

 

La Côte d’Ivoire, qui a déjà marqué les marchés internationaux avec des émissions en dollars, en euros, puis en francs CFA, poursuit ici une politique claire de diversification. Cette démarche vise à réduire la dépendance aux eurobonds classiques, à l’heure où les taux internationaux sont à la hausse et où les investisseurs se montrent plus prudents face au risque africain.

 

En intégrant le marché japonais, Abidjan renforce ainsi sa résilience financière, et envoie un message politique et économique fort : l’Afrique peut désormais séduire au-delà de ses partenaires traditionnels.

 

Un pari sur la confiance

 

Le succès de cette émission survient dans un contexte global marqué par une forte volatilité des marchés financiers. Pourtant, les investisseurs japonais ont répondu présent, convaincus par le sérieux des fondamentaux économiques ivoiriens. Cette confiance a notamment été bâtie lors d’un roadshow au Japon en avril 2025, au cours duquel les autorités ivoiriennes ont démontré leur capacité à gérer efficacement leur économie.

 

Selon Makoto Yamada, analyste senior chez Nomura Securities, « le Samouraï Bond de la Côte d’Ivoire est un signal fort : l’Afrique peut séduire au-delà des marchés occidentaux traditionnels ». Cette citation illustre bien l’importance symbolique et stratégique de cette opération.

 

Et maintenant ?

 

Ce premier pas sur le marché japonais pourrait ouvrir la voie à d’autres États africains, prêts à diversifier leurs sources de financement dans un environnement mondial plus complexe. À noter, le taux proposé par la Côte d’Ivoire est compétitif, inférieur à beaucoup d’eurobonds actuellement en circulation, ce qui témoigne de la qualité perçue de l’émetteur.

 

Cependant, une question reste en suspens : à quoi seront précisément affectés les 50 milliards de yens levés ? Si l’absence de détails suscite une certaine attente, le label « sustainable » laisse entendre que les fonds financeront des projets à forte valeur sociale et environnementale, alignés avec les standards internationaux.

 

Enfin, emprunter en yens expose le pays à un risque de change qu’il devra gérer avec vigilance, pour ne pas compromettre la soutenabilité de sa dette souveraine.

 

En accédant au marché obligataire japonais, la Côte d’Ivoire envoie un message clair : l’innovation financière peut être africaine, crédible et durable. Cette réussite n’est pas qu’un exploit ponctuel ; elle ouvre une nouvelle voie pour le continent, à condition que les fonds mobilisés soient judicieusement utilisés pour soutenir un développement inclusif et durable.

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