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  • 31/07/2025

Le Ghana baisse son taux directeur à 25% : Un pari audacieux pour la croissance

La Banque du Ghana a surpris les marchés en réduisant son taux de politique monétaire de 300 points de base, le faisant passer de 28% à 25%. Cette décision, annoncée mercredi à l’issue de la 125ème réunion du Comité de politique monétaire (MPC), marque un tournant dans la stratégie économique du pays. Pourquoi ce choix audacieux ? Quelles en sont les implications pour les Ghanéens ? Décryptage.

 

Une économie en pleine reprise

 

Le Ghana traverse une phase de redressement économique remarquable. L’inflation, qui culminait à 23,8% en décembre 2024, a chuté à 13,7% en juin 2025, son plus bas niveau depuis décembre 2021. Cette désinflation s’explique par une politique monétaire stricte, une discipline budgétaire et une forte appréciation du cedi, qui a gagné 40,7% face au dollar, 31,2% face à la livre sterling et 24,2% face à l’euro en 2025.

 

La croissance économique suit la même trajectoire. Le PIB réel a progressé de 5,3% au premier trimestre 2025, porté par l’agriculture et les services, avec un PIB non pétrolier en hausse de 6,8%. Les réserves extérieures se sont renforcées, avec un excédent commercial de 5,6 milliards de dollars et un surplus du compte courant de 3,4 milliards au premier semestre.

 

« Les conditions macroéconomiques se sont nettement améliorées, les attentes d’inflation sont bien ancrées, et la confiance dans l’économie revient », a déclaré Dr. Johnson Pandit Asiama, gouverneur de la Banque du Ghana, lors d’une conférence de presse à Accra.

 

Pourquoi réduire le taux directeur ?

 

Le taux de politique monétaire, ou taux directeur, est le taux auquel les banques commerciales empruntent auprès de la banque centrale. En le réduisant, la Banque du Ghana vise à rendre le crédit plus abordable, stimulant ainsi l’investissement et la consommation. Cette baisse de 300 points de base, la plus importante depuis des années, répond à la pression des entreprises, qui dénoncent des taux d’emprunt prohibitifs, souvent supérieurs à 25% depuis septembre 2022.

 

« Une réduction du taux est nécessaire pour relancer la production et soutenir la croissance », avait déjà plaidé Joseph Obeng, président de la Ghana Union of Traders Association, observateur lors de la réunion précédente du MPC.

 

Les analystes s’attendaient à une baisse plus modeste, de l’ordre de 200 points de base. « C’est le début d’un cycle d’assouplissement qui devrait se prolonger, car les perspectives d’inflation restent benignes », estime Leslie Dwight Mensah, économiste à l’Institute for Fiscal Studies.

 

Un pari risqué ?

 

Malgré l’optimisme, des risques persistent. Dr. Asiama a mis en garde contre les tensions commerciales mondiales, les hausses potentielles des prix du pétrole et les ajustements des tarifs publics, qui pourraient raviver l’inflation. Le Fonds monétaire international (FMI), qui soutient le programme de réformes du Ghana, a recommandé de maintenir une politique monétaire prudente jusqu’à ce que l’inflation atteigne la cible de 6 à 10%.

 

La dette publique, bien qu’en baisse de 15,6% au premier semestre 2025, reste un défi. Un déficit budgétaire de 7,9% en 2024 pèse encore sur l’économie, malgré un excédent primaire de 1,1% du PIB cette année.

 

Quels impacts pour les Ghanéens ?

 

Pour les entreprises, cette baisse du taux pourrait alléger le coût des emprunts, favorisant l’expansion et la création d’emplois. Pour les consommateurs, des prêts moins chers pourraient stimuler l’achat de biens durables, comme les voitures ou les logements. Cependant, si l’inflation repart à la hausse, le pouvoir d’achat pourrait en pâtir.

 

Vers un assouplissement progressif

 

La Banque du Ghana adopte une approche prudente mais optimiste. « Le Comité continuera d’évaluer les données et réduira probablement encore le taux si la désinflation se poursuit », a promis Dr. Asiama. Les prochaines réunions, prévues en septembre et novembre, seront cruciales pour confirmer cette trajectoire.

 

Le Ghana, autrefois aux prises avec une crise économique, semble sur la voie de la stabilité. Cette réduction du taux est un signal fort de confiance. Mais dans un monde incertain, la vigilance reste de mise.